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62 VIEUX CHATEAUX DU LYONNAIS. lorsque vers 1630, éclata entre les habitants du ressort et le seigneur du lieu un procès curieux rapporté par Henrys qui avait même écrit dans la cause. Après avoir posé en prin- cipe, que suivant les règles du droit féodal, toute transaction passée entre le seigneur et les emphytéotes, élaitsans valeur quand elle renfermait des charges plus fortes que celles por- tées dans les anciens terriers, ce Jurisconsulte nous raconte que le seigneur de Vaudragon, ayant profité des troubles cau- sés par les guerres civiles, et de la présence des troupes dans ses domaines, avait, par un traité, fait engager ses habitants et justiciables à lui payer chaque année un bœuf gras. Celle redevance fut acquittée par eux pendant plusieurs années. Mais quand des temps plus calmes revinrent, ils refusèrent formel- lement d'exécuter à l'avenir celte obligation moins onéreuse qu'arbitraire. De là un procès s'engagea devant le bailli du Forez. Le seigneur invoqaa la transaction. Mais les habitants demandèrent la reproduction des titres énoncés dans ce traité. Vainement le seigneur allégua qu'ils s'étaient perdus pen- dant les guerres civiles et les maladies contagieuses ; ces do- cuments n'ayant pu être reproduils, le bailli du Forez et la Cour sur l'appel, annulèrent la transaction et déchargèrent les habitants de la redevance qui leur avait élé imposée (l). Alors même qu'à ce litige ne se rattacherait pas le nom illustre d'IIcnrys, ce fait méritait d'être rapporté ici ; car ij nous révèle un immense progrès dans l'émancipation des po- pulations rurales. Quand on voit ainsi de faibles paysans résis- ter à de puissants seigneurs, et parvenir à faire triompher la justice de leur-cause devant les tribunaux du Roi, on ne peut s'empêcher de reconnaître que l'on est loin du temps où avait cours ce dicton vulgaire : Entre toi, vilain, et ton seigneur, il riyapas déjuges, fors Dieu. Ou sent qu'un pouvoir plus ré- (1) OEuvrcs de C. Henrys. I. p. 847.