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514 DES PREMIERS SIÈCLES siècle et le secret de l'autorité que les papes de cette époque exer- ceront sur les princes, sur les rois, des arrêts qu'ils rendront dans la lutte de la France et de l'Angleterre. Le règne de Louis-le-Gros doit nous frapper encore à un autre titre. C'est alors pour la première fois que nous voyons toutes les classes de la population de la France, s'unir sous la bannière royale pour repousser les princes étrangers. Je ne voudrais pas abuser de ces mots : la nationalité française ; ni prétendre qu'on n'en trouve aucun germe dans les temps qui précédent ; mais n'est-ce pas un fait significatif que cette armée déjà nombreuse qui réunit, vingt-cinq ans après la Croisade, pour arrêter l'envahissement du territoire, les milices du roi, des seigneurs, des villes, des paroisses de campagne. La France n'est plus un fragment d'Empire, une agglomération de pro- vinces ; elle cesse également d'être une arène où luttent des ra- ces opposées, où la civilisation transige avec la barbarie ; elle est désormais une nation, une puissance, elle a une grandeur qui lui est propre et le sentiment de ses destinées. C'est alors, ne l'oublions pas, que la féodalité change de ca- ractère, c'est alors que la régularité s'établit dans tous ses rangs, que ses usages deviennent des lois, que les droits et les devoirs de chacun sont constatés, reconnus, que les pouvoirs trouvent une limite certaine, que les chartes, les constitutions de toute espèce s'écrivent et nous révèlent le progrès accompli dans la condition des sujets. Le XIIe siècle nous a laissé une masse énorme de chartes signées par les seigneurs et qui ne sont que les conventions faites par eux avec les habitants d'une ville ou d'un territoire. Conventions qui nous montrent la propriété, la liberté déjà presque complètes dans les populations inférieures, ou n'ayant plus guère d'autres entraves que celles que leur imposaient les nécessités d'une police difficile et les rigueurs d'un ordre politique vicieux. Ces lois partielles, locales et quelque peu incohérentes, vont devenir le droit commun de la France, et trouveront une place prochaine dans les grands recueils des premiers juris- consultes féodaux. Nous sommes donc arrivés au second âge