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BÉRANGER ET PIERRE DUPONT. 79 broderont et raffineront, à qui mieux mieux, sur ce thème de la triade ; j'en ai pris mon parti depuis longtemps : quand je rencontre ladite triade, je saute les feuillets ; cela vaut mieux que de se mettre la cervelle à la gêne, pour ne rien com- prendre. Par une de ces contradictions très fréquentes dans la plupart des esprits, M. Dupont, si subtil en de certains moments, est très réaliste dans d'autres; et, à mon avis, c'est dans cette faculté réaliste que réside sa plus forte part d'originalité. M. Dupont, jusqu'à présent, ne l'a appliquée qu'à rendre certaines scènes de la vie des champs ; mais il y a parfaitement réussi; il est, dans cet ordre-là , complètement neuf, c'est le lopin de terre qu'il s'est adjugé, en vertu du droit de premier occupant, dans le grand royaume de la poésie, et, dans ce royaume, n'est pas propriétaire qui veut. La plupart ne jouissent que du droit d'aller et de venir sur ces terres. Que M. Dupont environne de haies son petit domaine, qu'il s'y retranche ; il est bien à lui. Ce n'est pas que ses chants rustiques, vraiment remarquables, soient nombreux ; Il en est jusqu'à trois que l'on pourrait citer : La Mère Jane, le Chien du Berger, le Lavoir, et quelques autres ; ils ne sont pas entièrement irréprochables : quelques taches çà et là les déparent; mais, telles quelles, ces pièces décèlent une inspiration sui generis très marquée. La Mère Jane est une vivante et grasse idylle qui réjouit le cœur; je n'en voudrais oter que le dernier trait : Pourquoi nous apprendre que Jane et son époux se battent quelquefois ; cela gâte un peu le tableau, sans le rendre plus vrai. La dernière strophe du Chien du Berger, vise à l'esprit, sans y atteindre. Ces vers: C'est tout de même vrai, j'y pense, Que les chiens n'ont pas de bonheur! semblent appartenir au répertoire des chansonnettes que débite M. Levassor. De même qu'à force de raffiner, M. Dupont, risque d'être