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254                            AUTOBIOGRAPHIE
 remplacement de Revoil, qui avait donné sa démission pour se
 retirer à Aix en Provence, auprès de son beau-père. C'était en
 1818, et cinq ans après, Revoil, appuyé par une puissante pro-
tection, obtint d'être réintégré dans cette place et de m'en faire
renvoyer sur un prétexte imaginaire. En dédommagement de cet
 affront, on m'offrit le titre de peintre de la ville, que je refusai ;
et, le 24 juin 1824, je fus nommé chevalier de Saint-Michel. Heu-
reux d'un titre si honorable, et d'avoir retrouvé ma liberté, je me
remis avec ardeur à mon tableau de Louis de la Trémouille. Je
terminai aussi la Chartreuse de Saint-Bruno et une étude que je
fis à l'Ile-Barbe, à'Une fontaine sous un pavillon de verdure;
une jeune fille, en y puisant de l'eau, regarde avec émotion des
colombes qui se béquettent. Je portai ces trois tableaux au Salon
de 1824. Depuis lors je cessai de peindre ; car, malgré le petit
 nombre de mes tableaux, et mon désir de peindre encore quel-
 que sujet plus capital, le mauvais état de ma santé m'obligea de
garder un repos absolu , repos qui dura près de vingt ans.
 Lorsque, en 1840, ayant perdu M. Grognard, mon parent et mon
premier maître, soit la révolution que me causa cette perte, soit
quelqu'autre sentiment, je fus frappé spontanément d'une atta-
que nerveuse qui me paralysa le côté gauche. Cependant, grâces
aux secours de la médecine et aux soins constants de ma femme,
je parvins à me rétablir, à l'exception de ma main gauche qui
est toujours très-faible ; mais, par un bonheur inouï, ces crises
nerveuses, loin d'affaiblir mes facultés intellectuelles, leur don-
nèrent un nouvel essor, et j'éprouvai le désir de reprendre mes
pinceaux. Alors j'entrepris de terminer une ébauche du Cloître de
Saint-Trophime d'Arles, commencée depuis vingt ans. J'y plaçai


 apostolique et sa haute piété, qui l'ont appelé à diriger la cure de la modeste
paroisse de Saint-Georges.
   C'est ainsi que l'étude des arts, dont le but est le beau idéal, loin d'affaiblir
les sentiments religieux, tend plutôt à développer la vocation religieuse, quand
elle germe dans un cœur pur.
   Dans tous les cœurs bien nés le goût des arts annonce ou développe toujours
 des sentiments nobles et élevés.