page suivante »
LETTRES DE SAINT-ÉTIENNE 35 î trop vite, sous peine de s'en repentir cruellement plus tard. Ce désir, loin de diminuer chez toi, prend de nouvelles forces, et, par conséquent, il mérite une attention plus sérieuse. Pour te dire, mon ami, ce que je pense de ta vocation, ce m'est tout à fait impossible. C'est à toi à bien te rendre compte si ce désir est constant, ou si c'est seules ment un caprice de certaines heures, si ce qui te pousse à ce dessein est vraiment une ferme volonté de servir Dieu de la manière la plus parfaite, ou bien seulement l'ennui d'une position présente, qui n'est pas tout à fait ce que tu voudrais qu'elle fût. Sonde donc ton cœur, mon bon frère^ tâche bien de ne pas te faire illusion, implore les lumières de l'Esprit Saint, consulte ton confesseur, et, surtout, éprouve-toi dès à présent en cherchant à pratiquer les vertus qui te seraient un jour plus spécialement imposées. Celui-là seulement sera bon religieux, qui est capable de faire son salut dans le monde et d'y vivre saintement s'il est obligé d'y rester. Qui peut le plus peut le moins, et si nous ne sommes pas fidèles dans cette vie inférieure, nous ne pourrons pas l'être dans l'autre. Quant au travail préparatoire que tu as à faire, sois bien certain, mon cher frère, que tu te l'exagères beaucoup, et surtout que tu t'en troubles outre mesure. Tu désires être prédicateur, mais ce bien est éloigné encore. Si tu entres dans un ordre "religieux, on saura bien te mettre où tu pourras être le plus utile, et tu auras toutes les facilités pour t'instruire. Tu me dis : Pour arriver à bien prêcher, il faut étudier les Pères de l'Eglise dans leur langue originale. C'est une idée fausse. Je ne sais pas s'il y a un prédicateur qui ait fait ce travail sur tous. Sans doute il est bon de les lire, mais cela se fait à la longue. Ne vas pas croire que je veuille te décourager du travail, bien loin de là , emplis-toi