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                LETTRES DE L'ÉCOLE NORMALE                       263

et l'autre ne peut pas me nuire. Reste donc l'argumentation
pour laquelle je cours une rude chance, et la leçon dont je
suis assez sûr. Voilà deux jours que l'argumentation est
commencée, mais je ne suis pas encore tombé au sort.
Despois a passé le premier, par un singulier hasard ; c'est
le premier nom qui soit sorti de l'urne. En résumé j'ai bon
courage, et je n'ai pas de raisons pour le perdre. Voici
quelque chose d'important. Hier soir, M. Viguier vint faire
l'examen d'anglais à l'Ecole, et moi, comme le premier pro-
fesseur, j'étais assis au bureau à côté de lui. Mes élèves ont
tous très bien passé, ceux même pour lesquels je craignais
beaucoup ont réussi au-delà de toute 'espérance : c'était à
ne pas y croire, et M. Viguier était enchanté. En se retirant
il m'a fait toute sorte de compliments et de promesses. Il
parlera à M, Dubois. En outre, en me souhaitant un bon
succès à l'agrégation, il me dit quelques mots suivant
lesquels il semblerait que nos copies aient déjà été corrigées,
et que les miennes ont réussi. C'est un soupçon assez
vague mais qui peut avoir réalité. Le malheur, c'est que
d'après les prévisions raisonnables, il y a huit ou dix con-
currents qui devraient passer avant moi.
   On vient chercher ma lettre. Adieu, mes chers parents,
je vous embrasse. Aimez-moi bien. Ma santé est très bonne,
je vais nager tous les jours pouf me rafraîchir; j'ai rêvé
toute la nuit à l'agrégation, et quand le moment viendra de
paraître j'aurai bon courage;
   je suis enchanté dé la promesse de M. Bedel.
   Je voudrais bien que mon père allât voir Monseigneur (1)
et lui parlât de tout cela.
                                           Votre fils.


  {1) Mgr dt Bôhâld s'intéressait beaucoup au jeune normalien.