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FRANÇOIS LEPAGE. 143 sacré s'allumer dans son âme, il entendit aussi les cares- sants appels de la réputation et de la gloire ; mais il sen- tait que le moment n'était pas venu. Des études complètes, les difficultés du début auraient exigé de sa famille de trop considérables sacrifices ; sans renoncer à ses rêves, sans dire adieu à ses projets, il laissa ses amis courir à la réputation, et, avec l'espoir de ne faire qu'un sacrifice momentané, il entra dans le cabinet d'un fabricant. Il travaillait avec conscience et ardeur, non sans prêter l'oreille aux bruits du dehors, lorsqu'une place avanta- geuse lui fut offerte à Saint-Etienne. Il quitta Lyon et se rendit dans la ville des armes et des rubans, où ses pré- cieuses qualités le firent apprécier comme il le méritait, mais où son temps lui appartint moins encore que jamais. Or, tandis qu'il s'escrimait à faire courir sur les bandes gracieuses du satin des ornements dignes des fées, un de ses intimes amis, M- Genod, et, comme lui, un des plus jeunes de l'Ecole, entreprit d'ouvrir à Lyon même un atelier de dessin pour servir de succursale à l'Ecole de ' Saint-Pierre, où les élèves n'étaient occupés qu'une partie de la journée. Sur son invitation, Lepage revint de Saint- Etienne et s'associa avec lui. L'essai réussit à merveille ; il répondait d'ailleurs h un besoin général. Les encoura- gements se multipliaient. Revoil lui-même appuyait et patronnait les deux jeunes gens de tout son pouvoir Lepage alors, à son tour, ouvrit ses ailes et, touchant au moment si désiré, il saisit son pinceau ; Dieu sait quels battements de cœur il éprouva devant sa première toile, quel ravissement le saisit quand il put consacrer à l'art pur, à l'art élevé tout le temps que ses études lui lais- saient. En 1855, à l'Exposition de Paris, les amateurs, moins blasés qu'aujourd'hui, s'empressèrent autour d'un tableau