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^ FRANÇOIS LEPAGE. 145 fabrique ou dans l'art indépendant, surent se créer un nom., une position, et surtout rester ses amis. C'est de cette époque où tant de jeunes réputations surgissaient, que date un de ses meilleurs tableaux. Fort remarqué, fort admiré aux expositions de Paris et de Lyon, il est conservé religieusement par sa famille, qui en sait, qui en comprend toute la haute valeur. Sur un socle de marbre, une coupe, élégante et vaste dans ses proportions, est à moitié remplie de fleurs. Deux tourterelles viennent se reposer sur ses bords. Les per- sonnes admises dans la famille, celles qui ont obtenu de visiter cette toile précieuse peuvent seules en dire le tra- vail consciencieux et fini. On retrouve là Lepage tout entier ; amoureux de la nature, fidèle et précis jusqu'à la minutie, c'est de l'art comme on est déshabitué de le voir depuis longtemps. Il apportait jusque dans les pré- parations matérielles, dont il s'occupait lui-même, tant de précautions et de soins, que l'œuvre faite depuis quarante ans n'a pas changé. Aujourd'hui, une foule d'ouvrages dus à de plus célèbres pinceaux, plus récem- ment produits, avec plus d'éclat et de brillant, n'ont déjà pu résister à l'action des années, exact emblème chez notre ami de ces vertus solides dont il était si riche et qui, ne sachant rien sacrifier aux vaines exi- gences du jour, demeurent constamment belles et at- trayantes. Ce tableau fut exposé à Paris. Lepage en confia le soin à son ami Orsel, qui lui écrivit: « Votre œuvre est faite avec trop d'amour et de conscience pour attirer la foule (com- bien les temps étaient changés, combien la décadence du goût avait déjà fait de progrès !) mais les vrais amateurs s'y arrêtent. Je voudrais qu'il fût acheté parla maison du roi ; malheureusement, je ne dispose pas des faveurs. »