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474 DEUX ÉPÉES TROUVÉES DANS LE RHONE. poignard de l'autre, jusqu'à ce que l'un des deux ait perdu la vie. Douze gentilshommes du Dauphiné et autant de Savoie , seront présents à une certaine distance pour venir,après le combat, enlever le corps du vaincu, et protéger de toute insulte le vainqueur; ils auront chacun un second ; d'Artignac doit être celui de Dom Philippin, et de la Buisse celui de Créqui. On convient encore que les deux seconds ne se battront point, et demeureront seule- ment tout proche des combattants. — Dès que les deux adver- saires en présence l'un de l'autre eurent mis l'épée à la main, Dom Philippin que la fureur transportait, et qui ne se mettait point en peine d'être tue pourvu qu'il atteignît son ennemi, commença à pousser Créqui d'une terrible force. Il lui portait coup sur coup et le fit reculer de plusieurs pas. Les gentilshommes dauphinois, fort alarmés de ce commencement du combat, cher- chaient à encourager Créqui, en criant par deux fois : à la rescousse Créqui, souvenez-vous de l'honneur de la France; mais Créqui gardant son sang-froid, se contentait de parer adroitement les coups, laissant son adversaire s'affaiblir par des efforts multipliés eUnutiles ; puis tout d'un coup, reprenant l'oflensive avec vigueur, il fond sur son ennemi, et lui porte un coup violent qui atteint Dom Philippin en pleine poitrine et le renverse à terre. Créqui s'avance aussitôt sur lui, l'épée haute et encore menaçante : « Dom Philippin , s'écrie-t-il, je vous donne la vie si vous voulez la demander. » —11 n'était plus temps, Dom Philippin avait perdu la parole, ne poussait plus que quelques faibles râlements, signes d'une mort prochaine, et expira peu après. A ce moment, un cri déchirant partit d'une des fenêtres du château ; tous les regards s'y portèrent ; l'on aperçut une dame voilée s'affaisser sur elle-même et tomber évanouie. Etait-ce la dame à Pécharpc qui avait voulu encourager de ses regards son valeureux champion, jusqu'au dernier instant? La tradition l'assure. Cependant Créqui se penche sur le corps de son ennemi et s'empare de son épée, les douze gentilshommes, ses témoins, lui lont cortège et l'accompagnent jusqu'au bateau pour traverser le Rhône et regagner le Dauphiné, mais les gentilshommes savo- yards accourus pour relever le corps de Dom Philippin, voyant