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NAPLES. 321 nombreuses, populaires et bénies enfin. Dans le magnifique parc de Caserte, où il est si facile de pénétrer, les beaux enfants du roi actuel jouaient, couraient à cheval, en calèche, affables et gracieux pour tous comme leurs parents. Si jamais une révolu- tion éclatait à Naples, ce serait l'œuvre encore, comme toujours, des étrangers. C'cstsur cette terre délicieuse, que les Anglais vont fuir les brouillards et le spleen de leur froide patrie, comme Byron nomme si bien l'Angleterre. Ils s'y établissent; ils en possèdent les plus fameux vignobles, les plus ravissantes villas, et parfois, depuis des générations, ils y pullulent, ils la convoi- tent. Ils n'y peuvent pourtant mettre le pied ni par la conquête, ni par la suzeraineté, ni par la faiblesse et l'incurie du gouver- nement en face de l'attitude énergique et vraiment royale de Ferdinand. Reste leur arme favorite et trop souvent heureuse, l'intrigue, la fraude, l'argent répandu, les révolutions sourde- ment préparées. La république peut-être plairait peu dans ce pays défavorable à l'austérité des mœurs et aux mâles vertus, comme nous l'avons dit tout à l'heure ; alors les sbires anglais mettent en avant le nom de Murât pour tâcher de réveiller quel- ques souvenirs et donner un drapeau moins suspect à une poignée de mécontents, car où n'y en a-t-il pas, puisque le ciel eut ses anges rebelles et l'Eden ses ennuyés de bonheur! Puis l'Anglais atteint encore un autre but; aux yeux des gens hon- nêtes, paisibles, mais peu voyants, il jette ses propres machi- nations sur le compte de la France, de la France au gouverne- ment si modéré, si juste, parce qu'il est sage et fort, parce qu'il est puissant, parce qu'il est intelligent, parce qu'il est bon et équitable comme la vraie grandeur !—Mais qu'importe ! l'Anglais est détesté à Naples ainsi que dans toute l'Italie et plus encore ; le Français y est généralement aimé, et surtout honoré. Je me rappelle à ce sujet une conversation que j'eus, à Rome avec quelques Romains de distinction, jeunes gens fort instruits et ardents patriotes dans l'acception vraie et honnête de ce mot si profané, qu'employé seul il semble aujourd'hui presque une injure. Nous parlions comme toujours de leur chère Italie, de son passé . de son présent, de son avenir ; je leur disais, ce 21