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240                   EXPOSITION DE 18S8.
elle est bien choisie, et il y avait là une scène très-émouvante à
reproduire qui, bien traitée, n'eût pas eu besoin du secours du li-
vret pour se faire comprendre. Mais si je vois dans ce tableau des
costumes du temps de Louis XIII, un amas de cuirasses et de
hallebardes, une femme raide et froide, un enfant à l'air étonné,
je n'y trouve ni une mère qu'on sépare de son fils, ni un fils qu'on
arrache des bras de sa mère.
   Voici maintenant une connaissance à nous, vieille de neuf mois:
les Quatre Henri jouant aux dés dans la maison de Grillon, à Avi-
gnon, de M. Devéria. Henri III et Henri IV, rois de France, Henri
de Guise et Henri prince de Condé, entourés de nombreux gentils-
hommes, jouent aux dés sur une table de marbre blanc. Tout à
coup le sang jaillit du cornet... Les nobles personnages, troublés
par ce prodige, ont interrompu leurs jeux, et pendant que Crillon
met bravement l'épée à la main, le médecin Miron dit : « C'est là
un signe que ces quatre seigneurs mourront assassinés. » Si cette
action paraît dramatique, le tableau n'est pas émouvant. M. De-
véria imite bien la soie, mieux que M. Hillemacher qui a égra-
tigné les vêtements de son Rubens en y semant trop de lumiè-
res ; il s'entend à draper une tapisserie et à sculpter avec délica-
tesse un pied de table. Son Crillon est fièrement campé, mais
l'air manque parmi cette foule dont tous les personnages,
richement vêtus, ont l'air d'avoir été copiés sur un modèle
unique.
   L'Esclave de Vélasquez, de M. Dehaussy, est préférable au ta-
bleau de genre qui s'appelle sur le livret : La lettre. Vélasquez,
peintre espagnol, a un esclave du nom de Paréja, qui travaille en
secret pour égaler son maître. Philippe IV, qui entrait fréquem-
ment dans l'atelier de son peintre, découvre le talent de Paréja
à la vue de ses tableaux et lui fait rendre la liberté. Les figures
sont dessinées, les accessoires ne sont pas négligés et n'ont
pas trop d'importance ; le tout est chaud et fin. La petite fille,
qui se réfugie dans les jambes de Philippe IV, a un visage ron-
delet et naïf qui intéresserait davantage si la chevelure était moins
blanche. Vélasquez ne se tiendrait pas moins bien si ses pieds
étaient m<5ins gros. M. Dehaussy ne se donne pas pour un peintre