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DES CLASSES RICHES. 111
et plus fréquents qu'a toute autre époque exempte d'invasion
étrangère. Les familles qui occupent un certain rang étaient
obscures et pauvres il y a quelques années : cette obscurité
et cette misère sont le partage de celles qui naguère étaient
opulentes et jouissaient du pouvoir. Et c'est lorsque vous
marchez sur un sol agité de tant de secousses que vous pensez
vous tenir toujours en équilibre et conserver sans travail le
patrimoine que vous avez reçu ! Erreur aussi profonde que
déplorable ! Le travail conserve seul ce que le travail a édifié,
seul il permet d'envisager l'avenir, sinon avec une con-
fiance absolue, du moins avec des espérances légitimes.
Lorsque nous vous conseillons d'embrasser une des nom-
breuses carrières que vous ouvrent les services publics :
la magistrature, l'administration, le génie, la marine, l'ar-
mée, etc., ou de choisir une profession indépendante, comme
la médecine,le barreau l'agriculture,le commerce, après mille
objections de détails, vous nous dîtes que vous n'hésiteriez
pas si vous étiez sûrs d'arriver à une place élevée ; mais vous
désespérez d'y atteindre, et dans ces positions moyennes, les
seules auxquelles vous ayez chance d'arriver, la rému-
nération est insignifiante pour vous, puisqu'elle n'ajoute a
votre revenu, déjà suffisant, qu'un quart, un sixième, un
dixième peut-être.
Je vous suis sur le terrain où vous vous placez ; je fais
abstraction de tous les principes au nom desquels j'ai parlé
jusqu'à présent, et je vous réponds comme s'il ne s'agissait
que de votre intérêt personnel :
Oui, vous êtes dans le vrai, en pensant qu'une rémuné-
ration élevée, une autorité puissante et une gloire étendue
ne sont que des lots exceptionnels sur lesquels vous ne
pouvez compter. Tous avez raison d'être convaincus que
les places éminentes vous seront vivement disputées par
ceux qui, nés dans la pauvreté ou dans la gêne, ont, par
l'énergie de leur volonté associée à leurs talents naturels ,
vaincu tous les obstacles que leur opposait le milieu dans
lequel ils étaient nés. Ils sont là ces admirables jeunes gens
pour rendre a la société des services précieux et pour avoir
aussi leur part des avantages qui en sont la juste récom-
pense. Ils sont là , pour faire ce qu'ont fait vos pères , et
nous espérons bien qu'il ne viendra jamais un temps où l'on
tâchera de rétrécir la libre accession dont ils jouissent Ã
tous les emplois et a toutes les dignités.
Mais enfin, quelque disputées que soient les places excep-
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