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                      LE PÈRE DE LA CHAIZE.                             65
pour la sûreté du territoire national qu'eut lieu le soulèvement
des Cévennes. Excités par de prétendues prophéties et par les
agents secrets du prince d'Orange, les montagnards de ces con-
trées coururent aux armes et promenèrent partout le massacre
et l'incendie. Cinquante-quatre églises devinrent la proie des
flammes et un certain nombre de prêtres périrent au milieu des
plus affreux supplices. Les fanatiques poussèrent même la féro-
cité au point d'égorger plusieurs centaines d'enfants catholiques.
   Le danger que courait la France exigeait une répression
prompte et terrible. Plusieurs maréchaux furent envoyés contre
les rebelles, mais comme le théâtre de la guerre était dans un
pays montagneux et sans route, malgré toute l'énergie que l'on
déploya et les rigoureux exemples que l'on fit, cette guerre dura
plusieurs années.
   Une réflexion inévitable naît de l'aspect d'une telle situation.
Jamais la France, si l'on en excepte les invasions anglaises et
les coalitions des temps modernes, ne courut peut-être un si
grand danger, puisqu'elle luttait à la fois contre une partie de
l'Europe et contre cette formidable insurrection. On ne peut dès
lors penser sans effroi à la position encore plus menaçante où
elle eût été réduite si, au lieu d'émigrer, la partie la plus fana-
tique et la plus remuante des protestants, imitant l'exemple des
montagnards des Cévennes, eût pris les armes dans l'intérieur
du royaume. Aussi, au point, de vue de notre indépendance na-
tionale, est-il permis de ne pas s'apitoyer outre mesure sur la
fuite des émigrés calvinistes.
   Ce qui rend extrêmement fondée, au reste, l'hypothèse que
nous venons d'émettre, c'est la coupable conduite de ces émigrés
envers la mère patrie. Nous rentrons dans le domaine historique.
S'il est un fait incontesté et hors de doute, c'est que la plupart
des protestants qui étaient en état de porter les armes s'en-
rôlèrent sous les drapeaux de l'étranger ; « Et l'on vit, dit un
historien moderne, des régiments entiers à la solde de l'ennemi,
uniquement composés de réfugiés, marcher contre la France (l).


   (1) Th. Lavallce. Histoire des Français, t. II, page 199, éd. gr. in-8,
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