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             LES
274                LYONNAIS AU COLLEGE DE JUILLY

bre commune, et l'avait enfouie au plus profond de son
pupitre d'écolier. Nulle gaieté en récréation, nulle ardeur
au travail. Soit paresse, soit impuissance, Jacques ne savait
jamais une ligne de leçon ; et, comme il était peu aima-
ble envers ses camarades, il ne recevait jamais à temps cette
charitable assistance, qui a sauvé tant de paresseux sympa-
thiques. Dès que le devoir était achevé, il tirait sa cassette,
ou traçait sur le papier les lignes les plus bizarres. « Il
« cherche la machine soufflante », disait méchamment
Colonies, son voisin. Le surveillant, le P. Peuvret ( i ) ,
avec ses doubles clefs ouvrit pupitre et cassette. Cettedernière
« était remplie des outils les plus polis et de toutes sortes
« de roues et quincailleries les plus fines (2). » Dans le fond
se trouvait la coque d'un navire.
   Jacques est appelé devant le Père Grand Préfet. « Je
« n'étudierai pas avant d'avoir confectionné un mouve-
« ment capable de faire avancer mon navire sur l'étang. »
Persuasion, menaces, punitions devaient rester sans résultat.
« Je construirai sur papier, si vous prenez mes rouages. »
Et l'enfant tint parole. Enfermé dans son cachot, il n'é-
crivit pas une ligne, tant que ses plans ne furent pas termi-
nés. Il y travailla deux jours entiers. Ils furent trouvés
étonnants par le régent de mathématiques, le P. Jean-Simon
Mazières, dont les ouvrages allaient être bientôt couronnés


  (1) Le P. Peuvret devait occuper la chaire de mathématiques de 1727
à I7ÎS-
  (2) Tout jeune encore, avec des instruments grossiers, il avait exécuté
une horloge en hois qui marquait exactement les heures. « Le plaisir
« d'arranger une petite chapelle, raconte Condorcet, était au nombre
« des amusements que sa mère lui permettait ; bientôt il orna cette cha-
« pelle de petits anges qui agitaient leurs ailes, et de prêtres automates
« qui imitaient quelques fonctions ecclésiastiques. »