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i86 LES LYONNAIS AU COLLEGE DE JUILLY CHER PÈRE, J'aime pourtant les vers, et je voudrais en faire, Mais un ennemi mortel vient toujours me distraire. Voulez-vous, mon cher Père, en savoir la raison, C'est que ma bourse est vide. Or, sans tant de façon, Comme voici le temps d'envoyer des étrennes, J'espère que bientôt vous m'envoyere^ les miennes, Que mon esprit alors recouvrant la gaieté, Je n'aurai pas besoin d'aller avec emphase Invoquer Apollon et monter sur Pégase Pour vous remercier d'une telle bonté. De même que l'esprit, le cœur a son langage, Et c'est de celui-là que l'on doit faire usage Dès lors qu'on ne veut pas avoir l'air affecté. Le cœur déleste et fuit ces pompeuses paroles, Qui décorent souvent des sentences frivoles. Il a soin de bannir tout le vain attirail De ces grands mots guindés qui sentent le travail. Il lui suffit enfin de paraître sincère ; Et c'est ce qu'il me faut, quand je parle à mon père. Quoique tout compliment aujourd'hui soit suspect, Guidé par l'amitié, l'estime et le respect, Je viens donc vous offrir mes timides hommages, Espérant que mes vers obtiendront vos suffrages. Et M. Charrier de répondre : « De la Roche, ce 27 décembre 1719. « Quoique j'aime également ta prose, mon cher enfant, « je suis très honoré d'avoir les premiers de tes vers, sur- et tout pour ce motif, et je t'en remercie. Si par la suite,