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220 ENFANTILLAGE géants ; ces derniers avaient même semblé abandonner Bavil- liers, d'où nos reconnaissances les délogeaient d'ailleurs assez souvent; mais ce jour-là , les Prussiens avaient voulu nous tendre un piège; ils étaient partis par compagnies et très ostensiblement du village et lorsque nos mobiles y arrivèrent quelques instants après ce départ, ils trouvèrent dans Bavil- liers un ennemi retranché, en force considérable, dont le tir abrité nous avait surpris et forcés de battre en retraite. Immobiles sur les rangs, nous attendions des ordres. Des officiers allaient de l'un à l'autre des postes de grand'gardes, stimulant l'attention des sentinelles, écoutant, interrogeant l'espace. D'abord silencieux et attentifs, les hommes, sac au dos et l'arme au pied, fatigués de cette inaction, com- mencèrent à causer, à s'interpeller d'une section à l'autre ; le froid les gagnait, ils battaient la semelle sur le sol durci par la gelée ; quelques mobiles s'entouraient la tête, les oreilles surtout, avec des mouchoirs ou des morceaux de cache-nez. Pour nous faire patienter, on nous fit faire quelques mouvements, des marches le long de la route, entre les maisons des Forges ; les habitants, réveillés, nous regardaient effarés de leurs portes entr'ouvertes. Chacun de nous inter- rogeait l'espace ; on comptait les coups de feu qui s'échan- geaient aux avant-postes. Comme la nuit s'avançait, la température devenait plus glaciale. Enfin, le jour parut et avec lui vint l'ordre de rompre les rangs et de regagner les cantonnements. Vers huit heures du matin, les quelques mobiles qui, malgré le froid, étaient dehors en corvée ou pour d'autres causes, vinrent en courant annoncer à ceux qui étaient à l'intérieur des cantonnements, que les Allemands bombar- daient la ville. Tous aussitôt de sortir et de se porter sur