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DIVAéAttONS, 848 Le soleil ne reparaissait quelques instants que pour pom- per avec ses derniers rayons la dernière averse tombée ; de de telle sorte, que si les gouttes de pluie ne se ressemblaient pas comme deux gouttes d'eau, il nous eût élé loisible de re- connaître sur nos vêtements celles qui les avaient déjà trans- percés. Sans doute, dans l'admirable économie de la nature, la pluie est nécessaire; el pourtant, j'aime mieux recevoir ses bienfaits que la recevoir elle-même. Celle qui séduisit Danaè' à coup sûr en séduit bien d'autres ; aujourd'hui, chacun retourne son parapluie pour recevoir ses pépites brillantes el stationne sous ses averses californiennes, préférant la chance d'être écrasé sous son poids, à celle d'être mouillé par l'autre. Cependant, il faut être juste et reconnaître l'influence mo- dératrice de la pluie dans les troubles politiques ; elle arrête souvent l'effervescence populaire, 'éteint le feu des passions surexcitées, rafraîchit l'ardeur des masses fanatisées, et telle émeute qu'aucune puissance humaine n'aurait pu calmer , s'est dissipée sous les torrents d'eau d'un ciel pacificateur. Il faut convenir encore qu'en mouillant les fusils, en étei- gnant leurs amorces, en inondant les poudres, elle a parfois atténué les homicides résultats des batailles et a pu même les suspendre ou les empêcher. De plus, la pluie abat la pous- sière du chemin ; en la convertissant en boue, elle nous vaut quelques aperçus de jambes fines et l'aspect de petits pieds bien chaussés; elle réunit sous le même parapluie un cou- ple à l'abri des jaloux ; grâce au vert berceau qui protège d'amoureuses confidences , elle pousse dans des grottes mystérieuses quelques Calypsos surprises par l'averse, qui hélas ! s'en trouvent aussi mal que l'immortelle déesse , la- quelle ne pouvait se consoler du départ d'Ulysse, au dira du grave Fénelon.