page suivante »
DECHAZELLE. - 259 « nos intentions, mais enfin vous vous formerez en vous « aidant de mes conseils. » Enchanté d'une telle offre, je me trouvai trop heureux d'être guidé par cet habile homme, d'être reçu amicalement dans sa famille, qui fut bien aise de trouver en moi de l'antipathie à l'égard des principes de la Révolution. Je m'appliquai tellement, je fis tant de progrès dans le dessin, qu'on voulut au jour de l'an me gratifier d'un paquet d'assignats, que je refusai, en disant que je ne croyais pas encore mériter cette faveur. Content de travailler à côté de M. Decha- zelle, dont la conversation était si profitable et si inté- ressante, je me trouvais témoin chaque jour des succès qu'il obtenait dans l'art de la broderie. Il consulta d'a- bord les vieilles étoffes des églises, très-curieuses d'exé- cution ; il savait qu'il existait dans le trésor de la métro- pole un devant d'autel brodé par. une reine, d'après un dessin de Jean de Bruges. Il était entouré d'une bordure en perles fines et en pierreries de différentes couleurs. Il représentait le Christ mort, sur les genoux de la Vierge, d'un travail admirable, imitant la plus belle peinture, tant les teintes étaient douces et fondues ensemble. Il avait remarqué que la beauté d'exécution de ce tableau était due à des points satinés, lustrés dans les clairs et assourdis dans les demi-teintes et les ombres. Le baron de Geramb, dont j'ai parlé, qui visitait avec lui cette étoffe, se plut à lui commander un tableau en soie, repré- sentant un vase de fleurs, entouré d'oiseaux et de fruits, dont il voulait faire présent à l'impératrice de Russie. M. Dechazelle le fit exécuter sur du gros de Naples de couleur brune. Il avait imaginé de faire les teintes rom- pues de ce tablean avec des brins de soie tordue qu'il