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LETTRES INÉDITES. 497 dédaignera point, parce qu'elle a toujours'su s'occuper de cho- ses utiles. Vous voyez que je suis devenu tout à fait homme de ménage. C'est là ma principale occupation; cela prend du temps, mais on en est dédommagé par le plaisir de ne point payer les choses au-delà de leur voleur et de tirer parti de tout. Si je ne m'étais pas livré sérieusement à ce soin, je ne sais comment j'aurais pu vivre* car je connais des gens qui dépensent trois fois plus que moi et qui certainement ne se nourrissent pas aussi bien. Je vois qu'on a égard à votre position en ne vous taxant point à l'emprunt forcé d'une manière exorbitante. Non seu- lement des maisons à la ville sont un capital mort, mais ce sont encore des propriétés extrêmement ruineuses, puisque la moindre des réparations absorbe plusieurs années de loyer. Je vous défie de faire relever une cheminée et couvrir dix toises d'une de vos maisons avec le revenu d'un an. Je ne suis point surpris que l'emprunt ait pesé sur les campagnes; c'est là que sont aujourd'hui les grandes fortunes, et malgré le prix des journées et des fournitures agricoles, il faut convenir que depuis deux ans les fermiers ont immensément gagné, aussi tout le luxe des hôtels est-il passé dans les chaumières, et il n'est pas rare d'y voir des meubles d'acajou, des lits do- rés, et qui forment un contraste assez plaisant avec le local. Je croyais le louis toujours plus cher à Lyon qu'à Paris, vous m'étonnez en m'apprenant le contraire. Gela tient sans doute à des causes particulières aux malheurs de cette ville ; car en général plus on s'éloigne de la capitale, moins l'assi- gnat a de valeur. La satire sur le luxe, de l'abbé Delille, est dans XAlmanach des Muses de cette année, qui s'est vendu d'abord 70 livres, ensuite 12& livres, dont je vous dirai le prix actuel en finis- sant. Non-seulement un million par an n'est pas trop pour bien vivre, mais aujourd'hui ce n'est pa-i môme assez; la plus