page suivante »
48:2 LE PÈHK DE LA CfUIZE. mais qu'elles sorliraient bientôt de leurs langes mystiques pour troubler le gouvernement et agiter l'Etat. » Telle était l'influence de l'apôtre de la grâce sur l'esprit de ses adeptes, que du fond de sa prison il les dirigeait aussi absolument que s'il eût été en pleine possession de sa liberté. Cette double tendance de la secte jansénienne à miner l'autorité religieuse et le pouvoir politique s'était déjà manifestée dans l'esprit de son fondateur. Jansénius avait si peu dissimulé ses senti- ments à cet égard, que , dès l'année 1637, il avait conseillé aux Flamands de secouer le joug espagnol, de se former en r é p u - blique fédérative comme la Suisse, ou de s'annexer aux Etats généraux de Hollande. Puis, pour rentrer en grâce auprès du roi d'Espagne, il avait écrit le Mars Gallicus , violente satire contre tous les Rois de France, depuis Clovis jusqu'à Louis XIII, et dans laquelle, dit Bayle (1), il criait de la manière la plus ma- ligne et la plus odieuse. L'arrestation de Saint-Cyran, et la fuite des premiers Solitaires de Port-Royal qui la suivit de près, loin de couper court aux progrès du jansénisme, ne firent que lui donner plus d'importance. A la mort de Richelieu, dont la rude main avait comprimé toutes les ambitions, le jansénisme fit cause commune-avec la Fronde. Les disciples de Jansénius s'unirent au Parlement et reconnurent à la fois pour leur chef religieux et politique le coad- juteur de Retz. Les casuistes de Port-Royal ne se firent aucun scrupule d'accepter pour guide ce licencieux pasteur. Voici comment s'exprime un historien moderne sur l'alliance des jansénistes avec le Parlement. Personne ne contestera l'au- torité de M. Louis Blanc lorsqu'il s'agira de déterminer les causes qui ont engendré la Révolution française. « Le jansénisme, dit-il, était un protestantisme bâtard, une espèce de compromis entre le principe d'individualisme et le principe d'autorité. C'est précisément par où son importance éclate dans l'histoire. Grâce à sa nature mixte. en effet, le jan- (1) Bayle. Dict. art. Jansénius. Voir aussi M. Crétineau-Joly, Hist. de la Compagnie de Jésus, t. IV.