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37i LETTRES SUR LA SARDAIGNE. cela tient, sans doute , aux privations de tout genre, auxquelles les condamne l'incurie ou l'ignorance sardes. Mais cette petitesse ne nuit en rien à la grâce de leurs formes et à leur vigueur. Les chevaux aussi, forts, élégants, comme des chevaux arabes, sont petits, et la race connue sous le nom d'Achetta, y est très commune. Dans les bois, sur les montagnes, on trouve réunis des animaux, dont les espèces différentes sont ailleurs séparées et dispersées sur tous les points du continent, depuis le mouflon et le capriolo ou daim tigré, jusqu'au renard bleu, depuis la perdrix et le faisan jusqu'aux oiseaux de passage : la cigogne et le fla- mant. Les animaux nuisibles, l'ours, le loup, y sont inconnus, et les serpents, très peu nombreux, n'y ont point de venin. Serpentum tellus pura , ac viduata venenis. Le climat de la Sardaigne est 1res beau; l'hiver, pour elle, comme disent les poêles, n'a pas de frimais, et jusqu'au mois de juin, la brise qui vient de la mer tempère les chaleurs de l'été. Quant à l'intempérie mortelle qui désole quelques contrées, elle existait déjà à l'époque de la domination ro- maine, car j'ai souvenance d'une apostrophe peu parlemen- taire de Cicéron à un nommé Tigellius : « Je me félicite, lui dit-il, de n'avoir pas à supporter un Sarde plus empesté que son pays. » Ailleurs, dans une lellre adressée à son frère, en Sardaigne, il lui recommande la prudence indis- pensable dans une contrée malsaine, cura mi fraler, ut valeas, et quanquam est hiems, tamen Sardiniatn istam esse cogites. Mais des travaux d'assainissement, et l'extension de la culture parviendront, sans aucun doute, à détruire ce fléau. Déjà le dessèchement et la culture de l'étang de Sanluri ont produit une amélioration incontestable. El maintenant, si nous pouvions pénétrer dans les en- trailles de cette terre promise, nous y découvririons des trésors de substances minérales : des mines d'anthracite d'une