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332 LOUIS-PHILIPPE D'ORLÉANS. nuit d'angoisses va succéder un jour plus formidable encore, le dernier jour de la monarchie ! Louis-Philippe avait signé, à minuit, l'avènement minis- tériel de M. Thiers et la nomination du maréchal Bugeaud au commandement général des troupes. Il s'était endormi plein de confiance dans le succès de ces dispositions, qui se tempéraient l'une par l'autre. Quel réveil ! la cité entière est sous les armes ; l'insurrection, encouragée sur tous les points par des défections ou des victoires, se propage dans d'effrayantes proportions; les Tuileries sont cernées, et, de- vant l'insuffisance trop certaine des dernières concessions royales, on commence à murmurer autour du roi les mots d'abdication et de départ. Les dispositions les plus contradic- toires se croisent dans un inexprimable désordre. Comme Marie-Antoinette, aux mêmes lieux, à un demi-siècle de dis- tance, Marie-Amélie exhorte l'infortuné monarque à mourir à la tête de ses troupes. Louis-Philippe, indécis, monte à cheval, passe sur la place du Carrousel une revue où les cris de vive la réforme ! se mêlent à ceux de vive le roi ! reçoit M. Thiers, qui détruit ses dernières espérances, et abdique enfin en faveur du comte de Paris, au bruit de la fusillade qui fait frémir les vilres de son palais. Restait à fuir. Les troupes se replient, les voitures de départ s'avan- cent, Louis-Philippe dépouille lentement les insignes du rang suprême, pendant que son altière compagne reproche à M. Thiers, avec un foudroyant éclat, l'ingratitude et l'aveu- glement de son opposition. Par un suprême et vain élan de cette volonté si longtemps souveraine, le monarque fu- gitif recommande solennellement à tout son entourage la régence du duc de Nemours (1) ; puis il prend le bras de Marie-Amélie, et traverse avec elle le jardin des Tuileries (1) H\st. des Trois Journées de Février, par Eug. Pelletait, p. 96.