page suivante »
128 LOUIS-PHILIPPE D'ORLÉANS. origine adoucirait aux yeux de l'Europe le caractère révolu- tionnaire de sa promotion. Il n'était pas jusqu'à l'économie presque proverbiale dont il avait fait preuve dans la gestion de son propre patrimoine, qui ne répondît de celle qu'il sau- rait porter dans l'administration des deniers de l'Etat. Les premiers moments du nouveau règne furent une suite d'espé- rances et d'enchantements dont le parti démocratique lui- même eut peine à se défendre. La Fayette exhalait en termes pompeux son admiration pour le jeune républicain de 1789 (1), et l'austère Dupont (de l'Eure) cédait à la séduction, alors ir- résistible, que l'affectueuse familiarité du prince, son esprit facile, son extrême activité, qui suffisait sans peine aux devoirs multipliés de la royauté, son langage cordial et plein d'aban- don, la chaleur de son dévouement aux idées libérales, exer- çaient partout autour de lui. Garde des sceaux, il contre- signait une proclamation dans laquelle, moins d'une semaine après son avènement, le nouveau roi se flattait « d'avoir en quelques jours assuré le bonheur et la gloire de la patrie. » Ces illusions étaient permises à un pouvoir qui, soit sympa- thie, soit nécessité, avait, par le fait seul de son établisse- ment, rallié l'immense majorité de la nation française. Indé- pendamment, en effet, de ses partisans directs ou intéressés, le gouvernement de juillet avait pour appuis la classe bour- geoise, héritière naturelle et impatiente de cette prépotence nobiliaire qui semblait destinée à s'éteindre avec le régime de la Restauration, et la classe populaire, par qui venait de s'accomplir celte révolution de Paris dont elle attendait d'im- menses bienfaits. Enfin, il s'était ménagé par quelques fa- veurs personnelles le concours du parti impérialiste, si puis- sant sur l'esprit de l'armée. Isolés ainsi de toute communion avec le nouveau régime, (1) Leltre à Joseph Bonaparte, 26 novembre 1830.