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DISCOURS DE M. A. BONNET. 49 résoudre les problèmes dont ils cherchaient la solution, ils se sont livrés aux entraînements de leur esprit, et ils ont inter- prété par des suppositions l'ordre et la cause des phé- nomènes. Quels sont ceux qui, les premiers, détruisirent cet esprit d'hypothèse, et cherchèrent par leurs préceptes comme par leurs exemples, à faire rentrer la science dans la voie dont elle ne peut sortir sans s'égarer? Sans doute une place im- mense doit être donnée, dans cet établissement de la vérita- ble méthode à Aristote, ce grand homme qui, suivant la ré- flexion de Cuvier, fit plus pour la science à lui seul, en une vie de soixante-deux ans, que n'ont pu faire après lui vingt siècles, aidés de ses propres idées et favorisés, tout à la fois, par l'extension du genre humain sur la surface habitable du globe et par le concours de tant d'hommes de génie. Mais Aristote avait eu lui-môme sous les yeux, l'exemple d'Hippo- crate, plus âgé que lui de soixante-seize ans, et qui non seulement a suivi la méthode d'observation, dans ses écrits restés encore classiques, mais qui a combattu directement la méthode hy- pothétique universellement adoptée de son temps. Dans son traité intitulé : De l'ancienne Médecine, il débute par combattre la méthode de ceux qui se créaient pour base de leurs raisonnements, l'hypothèse du chaud, du froid, ou de tout autre agent, et attribuaient les maladies et la mort à un seul ou deux de ces agents, comme à une cause première et toujours la même. Il poursuit ces hypothèses de ses raisonne- ments dans tout le cours de son ouvrage, et il revient sans cesse à cette idée que la médecine doit s'étayer sur les faits, sur ce qu'il appelle la réalité, et il comprend parmi ces faits, non seulement ceux que chacun peut recueillir, mais la tra- dition de la science qu'il faut développer par un sage emploi du raisonnement. Il y a, dans ces pensées, toutes les règles essentielles de i