Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
22           LES LYONNAIS AU COLLÈGE DE JUILLY

palais, des combats, des animaux féroces, des fantômes
effrayants. Le spectacle avait un tel relief, donnait une telle
illusion de la réalité, que le bon vieux P. d'Ayron, dit le
Mémoire cité ici ( i ) , en fit quantité de signes de croix.
   Comme bouquet final, Messire Cruche eut la malheu-
reuse idée de montrer une petite pièce de sa façon, où il se
moquait aimablement de la fameuse cérémonie du coucher
du Roi. LorsquJ apparut sur l'écran l'image de Louis XIV,
assis sur l'indispensable dans toute la majesté souveraine
entre deux grands chambellans tenant, qui la serviette, qui
le bougeoir, et se détournant un peu pour faire la grimace
et se boucher le nez, les élèves, tous gentilshommes et
royalistes convaincus, malgré les efforts des Pères, «se ruèrent
sur le pauvre montreur de lanterne, le dépouillèrent de ses
habits en un clin d'oeil, et lui administrèrent une volée
comme il n'en avait jamais reçu, en le flagellant à dos que
veux-tu. »
    Le P. de Sai nt-Denis n'osa pas renvoyer d'élèves, et se con-
tenta de payer, de ses propres deniers, à Messire Cruche, et
pour la lanterne brisée et pour son dos meurtri, la jolie
somme de 250 livres bien sonnantes. Les trois de Montri-
bloud, qui s'étaient montrés les plus ardents dans la bataille,
se virent supprimer « un voyage en Normandie (2) promis
« aux vacances prochaines. »
   Avec de tels enfants, les 5,000 livres avaient été promp-
tement épuisées. Le 23 septembre 1676, le P. Econome
pousse un cri : « A chacun encore une paire de souliers et


   (1) Sans doute un rapport de l'affaire envoyé au général de l'Oratoire.
   (2) Le voyage de Juilly à Dieppe aurait coûté 33 livres. Les places
étaient déjà retenues au carrosse, chez Roissy, sieur hôtelier, à la Pomme
d'Or à Paris.