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470              CHRONIQUE DE MAI I9OO

   Le 17 mai on volait, rue de la République, au cœur de
Lyon, cent mille francs de bijoux, retrouvés heureusement
en partie plus tard        parce que le bijoutier dévalisé,
M. Augis, promettait une prime.
   Le 20 mai, on déboulonnait sans plus de façon la statue
de Raspail, du square qui porte son nom, et peu s'en est
fallût que l'inventeur de la médecine empirique et cam-
phrée ne fut jeté à la fonte par les cambrioleurs. On ne
respecte plus rien aujourd'hui.
   Le suffrage universel n'a-t-il pas déboulonné, lui aussi,
sans plus de façon, M. le docteur Gailleton, par les élections
du 6 et du 13 mai ? M. Gailleton, qui semblait inamovible,
qui, depuis plus de vingt ans, était à la tête de la munici-
palité lyonnaise, a dû céder son fauteuil à un autre major
de l'Antiquaille, M. le docteur Augagneur, qui s'est déclaré
radical-socialiste.
   Puis, tout est rentré dans l'ordre et les affiches multico-
lores, qui faisaient de nos façades le plus bel ornement, s'en
sont allées où vont les vieilles lunes. Mais une collection en
est restée à la Grande Bibliothèque où les amateurs d'injures
et de calomnies pourront se divertir tout à loisir: «Infamie!
— C'est un mensonge ! — Les canailleries d'un tel ! —
Un tel est un voleur! — Un dernier mot. — Réponse à un
dernier mot. '— Ce n'est pas vrai! — » J'en passe et des
meilleurs.
   Aussi, froissé par ces abominables diatribes multicolores
qui émaillaient encore nos murailles, le soleil a-t-il cru
devoir se voiler la face et s'éclipser le 28 mai, pour la plus
grande joie des savants et des marchands de verres fumés.
   Que signaler encore, dans nos faits divers du mois ? De
belles courses au Grand-Camp, le 6 mai, et le 31, une colli-
sion terrible sur l'Ouest-Lyonnais, qui fait de nombreuses
victimes et cause deux morts.