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AU MIROIR ROYAL 185 tandis que l'expéditeur prétendait le droit n'être dû que selon le poids et charge. Portée devant les tribunaux, la contestation avait engen- dré une de ces procédures touffues, que compliquaient sous l'ancien régime les questions de compétence, les conflits de juridiction et la vénalité des juges attachés à leurs épices, qui se renvoyaient les uns aux autres les plaideurs comme des volants chassés par des raquettes. Si tout le papier noirci par les procureurs et les greffiers en vertu de ce merveilleux système, au cours des trois siècles qui ont précédé la révolution, avait échappé aux injures du temps, nul doute qu'en le comprimant par les procédés actuellement pratiqués, on en pût composer des moellons de quoi édifier des palais pour toutes les cours de justice de France et de Navarre. A ce fatras juridique, les péages avaient fourni un large contingent. Procédant du régime féodal auquel ils avaient survécu — on n'ampute pas facilement le fisc de ses tenta- cules, — en tout temps ils donnèrent lieu à des exactions, les péagers étant par nature enclins à appliquer les tarifs d'après une interprétation audacieusement extensive. Le sieur Marchant n'était donc pas une victime isolée de la rapacité des fermiers et, de son mémoire, qu'obscurcit l'évocation de maints traités de jurisprudence, arrêts, lettres patentes, déclarations etc., etc., une seule objection est à retenir : « que si les miroirs et les autres marchandises dévoient le péage sur le pié de 4 °/ 0 , cl non selon le poids et la charge : les vingt ou vingt-cinq péages que les marchands de Genève, de Lyon et d'ailleurs rencontrent sur le cours du Rhône jnsques à Beaucaire leur emporteraient le fonds de leurs marchandises, et il n'en paroîtroit plus à la foire ; réflexions qui suffit pour faire réputer la prétention de l'économe du RR. PP. Célestins extravagante. »