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TENTATION 381 Claude la regarde longuement d'un long regard très doux, et rit d'un rire béat. Virgine a remarqué l'expressive tendresse de ce regard, et soudain a tressailli. Comment a-t-elle donc pu, jusqu'à présent, penser que cet homme était un indifférent, qu'il n'était que son compagnon de travail, le père de son enfant ! A le voir maintenant sous ce jour nouveau, toujours gau- che et timide, mais si sincèrement épris, elle ne doute plus. Ce besoin d'être aimée qu'elle allait follement chercher près d'un autre, elle l'avait là tout près d'elle Son mari l'aimait !... Et alors, bourrelée de remords, perdant la tête devant cette découverte, parlant pour rompre à tout prix ce silence pesant, Virgine d'une voix tremblante dit à son mari : « Je vois que les dix écus y sont bien, oui, mais, et ton tabac, mon homme, et comment as-tu donc fait seulement pour manger, puisque tu es parti d'ici la bourse vide ? — Bast, laisse donc, je n'ai point le cœur à faire des dépenses, quand tu travailles ici si courageusement, répond simplement Claude;... la belle affaire! Je souperai mieux ce soir ! — Et puis, dame, le petiot ne s'en plaindra pas, car, vois-tu, femme, je n'en veux point faire un chemineau. Ces gueux-là ne respectent rien, ces misérables rôdeurs sont tous des voleurs ! — Méfie toi d'eux, Virgine ! — Sois tranquille, Claude ! déclare alors la jeune femme, du ton profond dont elle prononcerait un serment. — « Si jamais il revient par là , je saurai le chasser.» Et elle ajouta à mi-voix, se parlant à elle-même : « Oui, c'est bien cela, des voleurs... capables de vous prendre un trésor autrement plus précieux encore, que celui contenu dans une bourse ! » Allons, Lisou, un bon conseil en vous