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                              BIBLIOGRAPHIE                                223

maître sculpteur poète ! Quel étonnement ce serait, aujourd'hui ! Quel
blâme universel! Quels sourires! « Oui, voilà ce que verraient de nos
jours, ces grands génies de la Renaissance, tant le développement indi-
viduel est actuellement limité, restreint, atrophié ». M. de Bouchaud
nous montre ici l'influence heureuse qu'exerça Vittoria Colonna sur
l'artiste. Artiste elle-même, connaissant mieux que personne la valeur
et l'emploi du temps, elle l'applaudissait, quand il s'écriait : « Si les grands
peintres se montrent quelquefois intraitables, ce n'est pas par orgueil,
c'est parce qu'ils ne veulent pas abaisser leur intelligence par d'inutiles
conversations et la détourner de ses continuelles et profondes médita-
tions ». Vittoria mourut en 1549, et Michel-Ange la pleura en vers
magnifiques.
   Et c'est ainsi, conclut M. de Bouchaud, que « les quatre Ames de
Buonarotti se réunissent pour former un être prodigieux où tout s'associe
et se complète », et devant qui l'esprit reste inquiet. Cet artiste person-
nifie dans toute sa beauté la floraison de la Renaissance arrivée à son
plein épanouissement. Chez lui, les croyances religieuses s'associèrent
toujours aux idées philosophiques et politiques. « Les modèles du monu-
ment funèbre de Jules II, les sépultures des Médicis sont des conceptions
à la fois politiques, philosophiques et religieuses. »
   De plus, ces arts multiples qu'il a marqués au sceau de son prodigieux
génie, il les a encore honorés par son caractère. « Droit, vertueux,
sobre, laborieux, extrêmement chaste, plein d'abnégation, il pensa comme
un philosophe, sentit comme un poète et vécut comme un sage. » Sa
sobriété était extrême. Il dormait aussi peu qu'il mangeait, raconte
Condivi. « Il se levait la nuit pour noter ses idées avec le ciseau ou le
crayon. » Il était vieux déjà, lorsque le cardinal Farnèse, le rencontra
au milieu de la neige près du Colisée. Le cardinal fait arrêter son car-
rosse, demande à Michel-Ange où il va par un temps pareil : « A l'école,
répond-il, pour tâcher d'apprendre quelque chose. »
   Paul IV Caraffa fit faire à Michel-Ange de splendidcs funérailles à
Rome. Mais la dépouille du grand artiste avait été secrètement enlevée
par l'ordre de Cônie de Médicis et transportée à Florence. C'est là qu'au
mois de juillet 1564, le corps fut déposé dans l'église Saint-Laurent,
qu'ornèrent avec magnificence Cellini, Vasari et Bronzino. Un mausolée
élevé à Santa Croce, sur le plan de Vasari, par Giovanni del Opéra,
Ciobi et Lorenzi, perpétue la mémoire de Michel-Ange, non loin des
monuments de Dante, de Machiavel et de Galilée. Mais M. de Bouchaud