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i86 AU MIROIR ROYAL En somme le manifeste justificatif du citoyen d'Avignon est dépourvu d'intérêt et nous ne l'aurions pas exhumé du dossier poussiéreux où nous l'avons découvert, s'il n'était agrémenté d'une annexe dont nous voulons entretenir les lecteurs de la Revue du Lyonnais et dont nous donnons plus loin le texte in-exlenso. C'est que l'exposant, s'il était contribuable extorqué et vexé ; si pour soustraire son pécule aux doigts crochus des commis, il se débattait comme un diable menacé de l'eau bénite, il ne pouvait oublier pour cela que le rôle de plai- deur ne lui était échu que par circonstance alors qu'il rem- plissait d'une façon permanente celui de commerçant. Obligé, pour intéresser le public à ses rancunes, de mettre sous ses yeux le tableau des vexations dont il était l'objet, il avait cherché et trouvé le moyen de faire que la dépense qu'il s'imposait de ce chef, fût en même temps productive pour son trafic et ne vînt point enfler inutilement son compte de profits et pertes. Donc l'ingénieux Marchand — avec un cl ou avec un t, comme mieux vous l'entendrez — a joint à son manifeste justificatif un prospectus contenant une longue énumération des objets dont il faisait commerce au plus juste prix. Dire qu'il l'a joint n'est pas exact, attendu qu'il l'a placé au verso de la couverture, en avant du mémoire; ajoutons qu'il l'a fait décorer au sommet d'une taille de bois appa- rente au moins autant que celle dont est orné le mémoire lui-même, de telle sorte qu'on peut se demander si dans son esprit le prospectus n'était point l'objet principal, et le manifeste l'objet secondaire. Et voyez combien notre homme est avisé : mis en queue, son boniment courait le risque de rester ignoré du lecteur qu'aurait fatigué, avant la fin, la lecture du mémoire; en tête, rien de pareil à redouter!