Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                               AVEC M. DE SAINT-GERAN         33

de garde; le siège du gouvernement militaire était dans une
auberge.
   Le comte de Saint-Geran s'empara tout d'abcrd de
l'église. Il voulut en personne conduire cette importante
affaire dès le soir du 7 novembre, au moment où une par-
tie de ses troupes manœuvrait si piteusement à Château-
morand. Il entra dans le village à la tête de ses arquebusiers,
manda messire Jean Grimaud, curé de l'endroit, et se fit
de force ouvrir l'église. Elle fut livrée à toutes les profa-
naitons, convertie en arsenal, en corps de garde, en cham-
brée, en réfectoire; une sentinelle veillait au clocher. Toutes
les portes furent barricadées, excepté celle de la chapelle de
Lalière. Vu la saison déjà froide, un grand feu était allumé
dans la nef; les soldats se couchaient à l'entour sur une
épaisse litière, leurs armes rangées à leur portée. Un ton-
neau de vin volé à un gentilhomme de la paroisse, le sei-
gneur de Godinière, était installé sur l'autel Saint-Antoine.
Le « revestoir » tenait lieu de garde-manger, abondam-
ment pourvu d'oies, de poules, de quartiers de mouton, de
beurre et autres victuailles. Mais ces étranges libertés
n'empêchaient pas M. le curé et Charles Martin, son
vicaire, d'accomplir les fonctions du culte, et de dire des
messes pour l'âme de Jacqueline de Chaugy. Pourtant le
vicaire perdit une fois patience ; il nous en donne le motif
dans sa déposition, mais ces choses-là doivent être laissées
dans leur, langue originale : « Ledict déposant auroit veu
de la salktte, et par ce qu'il croyoit que ce fust faict de
personnes et s'en voullant fascher, lesdictz soldatz luy
dirent que c'estoit les chiens qui l'avoyent faict ! r>
   Une singularité c'est que, même dans cette efferves-
cence, ni M. de Saint-Geran, ni Diane ne perdaient de vue
les différends qui les divisaient,et instrumentaient ferme cha-
 N° I. — J a n v i e r 1900.                              ?