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ALEXIS DE JUSSIEU. 205 Les Jussieu firent comme J.-J. Ampère : ils laissèrent les sciences pour s'adonner a la politique et aux lettres. Le frère d'Alexis, Laurent de Jussieu, qui a vécu longtemps dans une retraite honorable à Passy, après avoir été, pen- dant de longues années, député et secrétaire général de la préfecture de la Seine, a servi la cause de la religion et des lettres par d'excellents écrits, qui ont mérité d'être traduits en plusieurs langues, et qui tous ont su plaire et surtout profiter a la jeunesse. Sa fille, Mme de Chalier, mariée a un des officiers distin- gués de notre marine, a publié aussi divers ouvrages où la sérieuse instruction qu'elle a puisée dans le patrimoine de sa famille se trouve heureusement alliée a la grâce persua- sive qui fait l'apanage de son sexe. Quant à Alexis, il a figuré parmi les écrivains les plus actifs et les plus brillants de l'opposition libérale qui marqua les dernières années de la Restauration. Son style est vif, ardent, empreint même quelquefois d'une verve mordante, mais les entraînements de sa polémique ne s'attaquèrent jamais à l'honneur des personnes. Il savait respecter ses adversaires et ceux-ci le respectaient à leur tour. Il eût pu redire, au déclin de sa carrière, le beau vers que Crébillon prononça le jour de sa réception 'a l'Académie française, empressée d'applaudir dans notre grand tragique cette douceur intime des moeurs privées contrastant avec les sombres et palpitantes émotions dont sa sévère muse fit tressaillir tant de fois la scène française : « Aucun fiel n'a jamais empoisonné ma plume. » Ces sentiments guidèrent M. de Jussieu dans diverses fonctions que lui confia le gouvernement parlementaire qu'il avait appelé de ses vœux, et qui garda ses inviolables sympathies.