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192 DU CULTfc DE SAINT JEAN.
Nous retrouvons ces feux avec les usages qui s'y rattachent,
plus ou moins variés, en Italie et en Espagne. Vers Tannée
1510, Martin d'Arles, chanoine de Pampelune, s'exprime ainsi
dans sa dissertation de super stitionibus : « Le jour de la Saint-
Jean, pour témoigner leur joie , les fidèles sonnent les cloches,
allument 'de grands feux, après avoir, de grand matin, recueilli
dans la campagne des herbes odoriférantes, médicinales, et qui
jouissent à cette époque de la plénitude de leurs vertus. Quel-
ques-unes allurnentdes feux dans les carrefours des rues et dans
les champs , afin d'empêcher que des sorcières ne passent par
ces lieux-là durant la nuit de la Saint-Jean. D'autres brûlent
les herbes qu'ils ont recueillies, et croient se préserver, par ce
moyen, de la foudre et de la tempête, comme aussi éloigner les
démons avec la fumée qu'elles produisent. » L'ancienne popula-
rité de la Saint-Jean était telle en Espagne,que les chrétiens, les
juifs et les maures y prenaient également part, et jetaient Ã
l'envi dans le feu, pour honorer la fête, les chrétiens du jonc, dit
un vieux poète, les maures du myrte , les juifs du roseau.
Notons ici, à propos du jonc, formant le tribut des chrétiens aux
flammes du bûcher sacré, que dans le pays des troubadours, le
jonc coupé à la Saint-Jean servait à une sorte de divination
amoureuse. On lit, en effet, dans le roman de Flamenca (Lexique
roman deRaynouard, p. 37) : «Jamais pour lui je neme soucie
de couper jonc à la Saint-Jean, pour éprouver si nous sommes
tous deux pareils en amour. »
Nous avons constaté la généralité et l'ancienneté de l'usage
des feux de la Saint-Jean. Nous allons maintenant en rechercher
l'origine.
La Nativité de saint Jean-Baptiste est placée au 24 juin, épo-
que du solstice d'été, de même que la naissance du Christ est
placée au 25 décembre , époque du solstice d'hiver. Ce n'est
point fortuitement, dit M. Breuil, que cette disposition des deux
fêtes se rencontre dans le calendrier ecclésiastique; elle tient Ã
des causes profondes qui fournissent à cet auteur la matière de
recherches savantes, dont nous ne pouvons donner ici que le
résultat.