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154              UNE PROMENADE A MARLIOZ.

formes modernes qui font regretter davantage le vieux
chalet des montagnes. Ce n'est pas toujours le bon
goût qui préside à ce genre d'architecture. Cette construc-
tion s'inspire beaucoup du caprice; elle prend à volonté
toutes les formes qu'on lui impose. Les plus originales,
les plus excentriques sont les plus recherchées. Elles ne
sont pas toujours les plus heureuses. Ces mêmes excès se
reproduisent dans la toilette des femmes ; les parures les
plus étranges se répandent partout. En dépit des répro-
bations universelles, elles bravent l'opinion, heurtent l'art
et l'élégance, et vont trouver justice devant les partisans
fanatiques de la mode.
   Quoi qu'il en soit, tout le monde veut avoir son chalet,
le plus grand propriétaire et le plus modeste rentier; l'An-
glais et le Parisien aspirent à ce bonheur. Sur toutes les
côtes de Normandie, de Boulogne à Cherbourg, on les voit
surgir à travers les falaises; la plupart manquent d'élé-
 gance et de légèreté. C'est un reproche général qu'ils mé-
ritent.
   Nous devons rendre justice au propriétaire de Marlioz;
 son chalet ne saurait encourir ce blâme ; il a su prévoir et
vaincre la difficulté. Conçu dans d'heureuses proportions,
il se présente avec une grâce incomparable ; la pureté des
lignes, la légèreté du toit, l'heureuse distribution des or-
nements captivent le regard et produisent une impression
favorable. L'œil se repose de préférence sur la toiture. Là,
en effet, l'architecte a déployé sa science et il a su rompre
la monotonie des lignes. Le toit, fortement incliné sur les
angles, se relève dans le milieu de chaque façade et décrit
des ogives mauresques d'un goût exquis. Les découpures
en bois blanc décrivent tous ces contours, encadrent les
ouvertures, servent de rampe et de galerie à tous les éta-
ges. Cette décoration s'harmonise fort bien avec la cons-
truction et définit parfaitement son caractère singulier.
En donnant notre appréciation, nous croyons être l'inter-
prète du sentiment général.