page suivante »
I. TERRAS ET C c . 295 ** Au premier mot de celte réponse extra-laconique, la marquise poussa un cri de triomphe : Enfin !... En y regar- dant de plus près, il lui vint quelques doutes, et il y avait bien de quoi. Elle resta donc chez elle et passa une mau- vaise nuit. Dès le lendemain, grâce à des interventions offi- cieuses, elle savait à quoi s'en tenir : elle e'tait moins avancée que jamais. Elle avait la fille sur les bras, elle e'tait à cent lieues plus loin de la caisse. Mme Terras donnait son consentement au bonheur des deux jeunes gens, c'était tout ce qu'elle donnait. Elle osait même pousser l'ironie jusqu'à se déclarer de l'avis de Nelida, savoir : que l'argent ne fait pas le bonheur et que la place de garde-général des forêts pouvait suffire à deux amoureux qui auraient de plus le plaisir de s'aimer dans les bois. Enfin, Mme Terras désirait qu'on ne lui parlât plus de cette affaire et qu'on la laissât tranquille. On était loin de compte, vous le voyez. Quel parti prendre avec cette tante féroce ? Renvoyer la nièce eût été le comble du ridicule et de l'odieux. La marquise en eut l'idée un instant ; disons a la louange du fils qu'il résista énergique- ment. Après une délibération où furent appelés les con- seillers intimes de la marquise, il fut reconnu que le parti h la fois le plus habile et le plus décent, pour venir à bout de la tante rétive, était de payer d'audace et de jouer son va-tout. Le mariage se fit. Les conseillers de la marquise connaissaient le cœur humain : ils comptaient, pour arranger les choses, sur le temps, les faits accomplis, la vieillesse, la solitude, les petits neveux, etc. Ce n'était point malhabile, assuré- ment, mais avec Mme Terras on pouvait avoir à décompter. i