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300 BIBLIOGRAPHIE. Mais M. Georg ïemple n'a point dirigé son voyage vers une grande ville encombrée par la foule, il est allé choisir son poste d'observation au penchant d'une rive escarpée du Rhin, non point même sur les quais de quelque bonne cité allemande, à l'ombre d'un château-fort ou d'une vieille ca- thédrale. Un village lui a suffi et il est devenu pendant vingt jours l'hôte d'une simple auberge, d'une de ces auberges comme Jean-Jacques Rousseau aimait à en rencontrer, sur l'heure de midi, au détour de la roule poudreuse qu'il venait de parcourir en piéton. Une cilation vjiut mieux ici qu'un commentaire, et j'emprunte au début de la première journée ce paysage si bien rendu par quelques détails d'une sobre et vive élégance : « Lecteur, il s'agit d'un village des bords du Rhin, il est « comme pris au piège entre la montagne couverte de vigne « et l'eau azurée du grand fleuve; aussi, à bien dire, il n'a « qu'une rue : toutes les autres ruelles sont des montées « vers les vignobles, et des descentes sur la rive. L'Auberge « jouit d'une vue superbe sur le Rhin et d'une terrasse « étroite qui ouvre sur le chemin de fer. Si l'on regarde la « barrière basse qui sépare ceite terrasse des rails, il est « impossible de ne pas penser h la facilité de suicide qu'offre « une pareille situation. Se coucher à la nuit tombante sur « le passage d'un train, ou s'y jeter au moment môme, en « plein jour, esl la combinaison la plus commode en ce bel « endroit. Ne préféreriez-vous pas cependant enjamber le « chemin de fer, et vous laisser envelopper dans les plis « profonds et caressants du grand fleuve ? La mort est plus « sûre et plus adroite ainsi : ce n'est pas un massacre, un « cadavre écharpé, sanglant; l'eau étouffe sans blesser, le « courant vous emporte sur un bord inconnu. Et puis jusle- « ment en face, la Lore-Lei, la fée du Rhin, cette roche qui « n'est point insensible quoique gigantesque : on dit qu'elle