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TIC-TAC
N0CVEL1E
C'était après le repas du soir. Anselme laissa tomber le verre
qu'il portait à ses lèvres et dame Sophie essaya de s'évanouir.
Henriette regagna sa chambre sans ajouter un mot, mais quand
le couple fut seul :
— Te l'avais-je dit? te l'avais-je dit? bélître! rugit dame
Sophie,- nous voilà donc chassés, pillés, grugés, mangés par ma-
demoiselle la rouge. Cherche un abri, cherche du pain! Moi,
j'irai chez mon père ; mais toi, tire tes plans, ça te regarde ; il
n'y a pas place pour deux chez nous!...
— Oh ! dit Anselme, et pourquoi mangés, pourquoi chassés ?
— Pourquoi, pourquoi, tais-toi ? tu me fais mal !... N'as-tu pas
compris : Dans trois mois je serai majeure ; elle compte les se-
maines, va, et les jours et les heures ! Si elle est née à minuit, Ã
minuit et quart, elle se lèvera pour te montrer la porte
— Impossible! fit Anselme, en se parlant à lui-même, on ne
me renverra jamais d'ici.
— Non ! on se gênera... On te gardera pour tes beaux yeux !
Bonnement, bêtement, on partagera l'héritage avec toi !... Oh!
le gros Claude ! ne vois-tu pas que la langue brûle à ta sournoise
de belle-fille de te crier : Hors d'ici, canaille !
— Moi, maugrebleu ! que lui ai-je fait? qu'a-t-elle à me re-
procher ? n'ai-je pas travaillé pour elle comme pour moi?
Hum ! hum !... Entre nous, pas précisément... Si elle allait te
demander des comptes de tutelle ?
(1) Voir la précédente livraison.
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