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436 HISTOIRE de gloire des vieux capitaines, on attache un espoir brillant à la fortune des jeunes officiers, on discute et on espère, jusqu'au jour où un premier engagement permet à chacun de donner des gages. L'armée, alors, suivant les circonstances, se décourage et se fait battre, ou donne sa confiance, s'en- flamme et se met à la hauteur de ceux qui la conduisent au combat. Parmi les chefs de l'armée de Savoie, on remarquait, en premier lieu, le comte Edouard, grand, beau , bien fait, habile aux armes, mais dont la fougue ne connaissait aucun péril, et qui montrait, au milieu de la phalange vieillie sous l'armure qui l'entourait, les qualités d'un soldat de fortune plutôt que celles d'un général ; d'ailleurs, généreux et pro- digue, et, disent les historiens, « tant libéral, qu'il passoit les limites de raison... tellement que souvent s'en trouvoil en arrière, car sa despense excédoit son revenu... A raison de quoi, ajoute Paradin, se faisojent souvent sur le peuple exactions et concussions pour la profusion du prince, qui donnoit plus qu'il n'avoit vaillant ; mais ce n'est pas libéralité d'oster aux uns pour donner aux autres. »... « Les escuyers d'escurye, dit un vieux manuscrit, ne pouvoient tant achetter de chevaux et de harnais que leur maître n'en donnast encor davantage. » Le règne de pareils souverains peut être bril- lant, l'histoire contemporaine peut les louer, mais la postérité est plus sévère, et la raison leur demande froidement compte du bonheur qu'ils n'ont pas su donner à leurs sujets. Après Edouard, on admirait le duc Robert de Bourgogne, environné d'une noblesse orgueilleuse et opulente, le comte d'Auxerre, époux d'Aliénor de Savoie, accouru d'une contrée éloignée autant pour acquérir de la renommée que pour amener des secours à son fougueux beau-frère, Guichard de Beaujeu, Guichard-le-Grand, comme dit l'histoire, offrant le rare mélange de l'intelligence et de l'audace, de la prudence