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BIBLIOGRAPHIE. DICTIONNAIRE DU PATOIS FORÉZIEN, par M. Pierre GRAS. Quand il ouvre, pour la première fois, le dictionnaire du patois forézien, de M. P. Gras, archiviste de In Diana, le lecteur éprouve cet embarras singulier du paysan qui, dans son por- trait même très-ressemblant, ne reconnaît point sa figure. Le lecteur forézien, au premier coup d'oeil, ne retrouve pas le langage qu'il est censé parler tous les jours. El cependant, rien de plus exact, de mieux réussi que cette peinture du patois de nos pays. Si, dans ce miroir, on s'étonne de lui voir des traits peu fidèles, un aspect étrange, c'est simplement parce qu'on le voit représenté pour la première fois; vienne l'habitude de le regarder, on ne le trouvera ni gauche ni lourd, on finira même par le croire d'une ressemblance par- faite et d'une avenante ligure. C'est aussi qu'aujourd'hui ce langage a tant perdu de son allure naturelle, s'est si bien déguisé en français bi- garré de costumes et de manières, que le brave forézien n'est reconnaissable que pour ses vieux amis. Sachons donc gré à M. P. Gras de lui avoir conservé sa physionomie native, el de l'avoir ramené à ses règles et à ses formes normales ; et jugeons ce livre, non pas comme l'expression actuelle, tri- viale et démonétisée d'un langage corrompu, mais comme le lableau de ce qu'était notre patois et de ce qu'il s'est con- servé dans quelques cantons privilégiés. Et vraiment il est de bonne famille ce fils de la langue d'Oc, ce frère des dialectes de Jasmin el de Mistral ; s'il est resté-campagnard el inculte, si les Iroubadours n'ont pas fait retentir son harmonie méridionale, l'auteur n'a que plus de mérite à lui consacrer sa trop tardive étude.