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1S2                         LES CROISADES.

ambassadeurs du schah de Perse, Uzum-Kassan, venant sol-
liciter les princes d'Occident de vouloir s'unir a lui dans une
sainte ligue, pour réprimer l'ambition envahissante de Maho-
met II, appelaient Charles VII roi des rois, et disaient :
« Nous ne demandons point d'argent, mais seulement l'en-
seigne du roi de France et ung capitaine en son nom, cela
vaudra pour nous plus que cent mille hommes (1). » Répu-
tation telle, que les Européens ne sont encore connus des
Orientaux, au XIXe siècle, que sous la dénomination de
Franks, et l'Europe sous celle de Frankistan (2). Nous suc-
combâmes, il est vrai, dans nos expéditions saintes, mais
la victoire coûta si cher a nos ennemis qu'ils ne songèrent
point à la poursuivre et se contentèrent d'être délivrés de
la terreur que nous leur avions causée. Nous tombâmes,
mais comme tombe le lion, qui terrassé, tient encore ses
assaillants h distance, par son intrépide regard et les éclats
de ses rugissements.
   Les Croisades retardèrent de trois siècles au moins la
chute de l'empire grec. Ce fut un immense avantage. Pen-
dant ce temps, l'Europe put se reconnaître, s'organiser et
s'affermir. Si les Osmanlis, après avoir franchi le Bosphore
et les Dardanelles, eussent rencontré devant eux les nations
chrétiennes à l'état d'anarchie et de dissension où elles se
trouvaient aux XI0 et XIIe siècles, sous le régime féodal, nul
doute qu'ils ne les eussent vaincues les unes après les autres.
« On frémit d'horreur, dit un historien, en pensant que la
France, l'Allemagne, l'Angleterre et l'Italie pouvaient éprou-
ver le même sort que la Grèce et la Palestine (3). » Or, avoir
épargné à nos belles contrées une semblable oppression, qui

   (1) Mémoires de J. du Cler"q, liv. IV, c. XXVII.
   (2) Eugène Bore. Correspondance et mémoires d'un voyageur en Orient,
t. I, p. 164.
   (3 Michaud, Histoire des Croisades, t- VI, liv. XXII, c. I.