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J0UFFR0Y. 18 une mèche à la soute aux poudres, il y mit le feu et s'éloi- gna rapidement ; dix minutes après, la frégate volait en éclats devant les Anglais qui s'avançaient pour la capturer. Après avoir rendu les derniers devoirs aux morts et pourvu aux soins que réclamaient les blessés, il ramena les survivants valides à Ancône ; sa blessure négligée exigeait des soins et du repos ; dès qu'il fut rétabli, il se rendit à Milan auprès du vice-roi, qui le nomma directeur des mines de plomb argentifère et aurifère de Vico-Novo et Brasio, auxquelles JoufFroy joignit celles de charbon fossile de Monte-Garpione, qu'il découvrit. Il passa deux ans dans cette position aussi agréable qu'indépendante, relevant immédiatement du mi- nistre du royaume d'Italie. Lorsqu'il fallut combler les vides qu'avait faits dans tous les services la campagne de Moscou, Jouffroy fut appelé à remplir les fondions de commissaire de guerre du deuxième corps.d'armée à Udine et attaché à la division Fraycinet pendant les campagnes de 1813 et 1814. La paix du 20 mai lui rendit la liberté ; il avait servi onze années, fait huit campagnes, reçu deux blessures; si l'on se rappelle les événements de la révolution qui présidèrent à sa première éducation, on jugera avec quelle joie il dut saluer la restauration du trône des Bourbons ; cepen- dant, l'impression du régime de la Terreur avait laissé dans son esprit l'horreur des excès qui empruntent le prétexte de l'intérêt public ; il défendit la légitimité avec talent et con- viction, comme principe d'ordre social et non comme le dra- peau d'un parti réactionnaire ; il appartenait 5 celle généra- tion grandie au souffle magnétique de la liberté, animée d'un enthousiasme patriotique aux récits de nos victoires, qui, confondant les malheurs et les enseignements des mauvais jours, s'est trouvée identifiée avec les idées de progrès réa- lisées en 1789, répudiant les crimes qui en 1793 épou- vantèrent l'humanité.