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120             UN QUATRAIN A M. E. SCRIBE.
â Paris, afin d'y trouver les paroles d'un opéra auxquelles
il put adapler le charme harmonieux de ses inspirations.
J'adressai donc au célèbre librettiste une lettre toute pleine
de séduisantes caplalions pour l'engager à m'y répondre ;
j'étalai à ses yeux les paillelles les plus chaloyanles de mon
style. Chacune de mes phrases lui faisait des agaceries et de
doux yeux; il ne pouvait, ce me semble, à moins d'être.un
barbare, s'exempler de m'écrire un petit mot de remercîment.
Vain espoir ! il chargea mon ami de mille choses aimables
pour moi, de louanges, de compliments, de salutations
distinguées, et, parmi toutes ces choses, il omit la seule à
laquelle j'aurais été vraiment sensible, une lettre! J'aurais
dû me tenir alors pour désappointé et rester coi ; mais
j'avais fréquenté des collecteurs ; ainsi que je l'ai déjà dit,
et si cette compagnie ne me mena point pendre, elle fut
du moins l'unique cause de la persistance que je mis à
solliciter encore M. Scribe dans une nouvelle lellre, où
jetant de côté toute pudeur à voiler le motif qui me la lui
faisait adresser, je lui avouais inconsidérément, sans doute,
ma fougueuse envie d'avoir quelques caractères calligraphi-
ques tracés par lui. Jamais, non jamais, on ne mit tant de
feu et d'éloquence pour obtenir si peu, car après tout, je ne
briguais que quelques mots. Eh bien ! celui qui attendrit
lui-même sur la scène un si grand nombre d'oncles et de
grands parents irrités, celui qui fit parade au théâtre d'une
si grande mansuétude pour des fripons de neveux et de
parfaits mauvais sujets, celui-là, dis-je, qui avait accordé
tant de MAINS dans ses vaudevilles, fut inébranlable dans sa
résolution de refuser la sienne pour satisfaire aux désirs d'un
de ses admirateurs. Alors désespéré de ce contre-temps,
j'adressais à l'inflexible auteur le quatrain suivant :
      De tous les grands auteurs dont la France fait cas
      Je connais l'écriture et j'en ai quelque bribe,
      Mais pourquoi faut-il donc qu'il soit appelé Scribe
                Le seul qui ne m'écrive pas?              J. PETITSEXK,