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                   ET PAUL-LOUIS COURIER.                   275

position, pourvu qu'il me fût permis de la parcourir à mon
aise; mais en être venu si près et n'y pouvoir mettre le pied,
n'est-ce pas pour enrager? »
    S'il est sensible à ces merveilles de l'art semées sur la terre
d'Italie, la belle nature méridionale ne le touche pas moins
vivement : « Pour la Calabre actuelle, ce sont des bois d'o-
rangers, des forêts d'oliviers, des haies de citroniers         Ce
n'est pas ici qu'il faut prendre exemple d'un bon gouver-
nement, mais la nature enchante. Pour moi, je ne m'habitue
pas à voir des citrons dans les haies. Et cet air embaumé au-
tour de Reggio ! On le sent à deux lieues au large quand
le vent souffle de terre. »
    Avec ces amours-là, notre soldat antiquaire et poète n'a-
vait guère peur des bons Calabrais qui nous brûlaient le plus
doucement du monde en revanche de nos fusillades : Il don-
nait deux batailles et saccageait quelques villes pour s'en al-
ler voir le temple de Proscrpine près Milet ; et puis si l'ar-
mée avait vaincu au pas de course, selon la mode du temps,
Courier rebroussait chemin, seul ou mal accompagné, fouil-
lant partout, sans songer qu'il y allait de sa vie.
    Ces préoccupations si éloignées des soucis du temps, ce cou-
rage indolent si différent de la valeur bouillante de ses com-
pagnons, sauvèrent Courier d'un avancement qui l'aurait
peut-être dévoué au pouvoir, dans un temps où tout com-
 mençait à graviter vers un seul homme.
    La campagne d'Italie finie, il donne sa démission et re-
 vient en France : ne demandant aucun emploi, il vit au mi-
 lieu des savants dont il recherche le suffrage et se fait esti-
 mer comme helléniste. Il compose quelques ouvrages d'é-
 rudition et de style, et semble voué à la vie littéraire; lorsque
 la campagne de 1809 s'appréle, il part, peut-être par le be-
 soin de reprendre son ancienne vie si active, si pleine de dan-
 gers, peut-être pour connaître un nouveau pays, peut-être