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174 ia question était assez difficile pour ne pas la compliquer d'un mystère, assez obscure pour lui épargner cet éclaircissement. M. Clément, qui produit ces choses comme autorité, qui lui-même voit, dans ses divisions trinaires, la preuve qu'il a trouvé la classification véritable, me paraît céder trop facilement à la séduction de ces analogies auxquelles on ne doit s'arrêter qu'autant qu'elles dérivent d'une cause commune que l'on aperçoive clairement et que l'on puisse montrer. Il faut se tenir en garde contre ces hallucinations de l'esprit. C'est par un nouvel et plus sévère examen qu'on les conjure ; les solitaires assaillis et tentés par de malins génies en détournaient les yeux el la pensée, cherchant, dans une méditation plus profonde, un refuge contre ces fantastiques appari- tions. Nous prenons trop au sérieux l'œuvre de M. Clément pour ne pas lui en dire toute notre pensée ; que ces critiques lui soient une preuve de l'estime que nous en faisons. C'est de la grammaire ainsi traitée que Quintilien disait : Plus habet in recessu quant in fronce promittit. DICTIONNAIRE OES RACINES ET DES DERIVES OE LA LANGUE FRANÇAISE, DANS LEQUEL ON TROUVE TOUS LES MOTS DISTRIBUÉS PAR F A M I L L E S , D ' A P R E S LA SIMILITUDE DE CONSONNANCE ET DE SIGNIFICATION; TAR. F R , CHARRASSIN ET F E R D , FRANÇOIS. 2 PARIS, CHEZ. HÉOIS. l84 - * N - S ° , DE SoO PAG. Nous ne sortons pas, je pense, des bornes de noire Revue en annonçant à nos lecteurs un livre publié à Paris. M . Charrassin a longtemps habité notre cité, où ses amis l'ont déjà vu à l'œuvre. Nous pensons leur être agréable en leur signalant le fruit de ce travail long et consciencieux. Il faut être doué d'une persévérance non commune, lorsqu'à l'aspect de nos dictionnaires renfermant cent à cent cinquante mille inols } on ne recule pas devant un travail qui con- siste à éplucher tous ces mots un à un, pour en composer des familles, en les coordonnant à la suite de leurs radicaux respectifs. Jusqu'à quel point les auteurs ont-ils conduit ce travail? Est-il parfait, est- il complet. ? Il faudrait le refaire soi-même pour s'en assurer. On ne peut ana - lyser un dictionnaire comme un roman, une histoire ou un poème. L'usage seul peut nous apprendre ce qui y manque; el, grâce à MM. Charrassin et François, le cadre est à peu près rempli, il ne restera plus qu'à intercaler les mots omis ; à dessein ou par oubli. Par exemple, j ' y trouve pluviomètre, instrument qui sert à mesurer la quantité de pluie ; et je n'y rencontre pas fluviomètre, la gra- duation qui sert à mesurer la hauteur d'un Meuve. Ils ne sont ni plus ni moins barbares l'un que l'autre, et la connaissance du premier est moins générale que celle du second. Us sont tout aussi connus et aussi importants que échomètre et ('chometrie. Cela dit en passant, jettons un coup-d'œil sur l'Introduction et sur la Pré- face remplies d'observations du plus haut intérêt. Dans le chapitre premier , sur VittiUté des mots, je ne sais s'ils ne font pas trop grande la part des mots , lorsqu'ils disent : « Que l'esprit puisse concevoir sans que la mémoire corpo- rihe par un mot l'objet de sa conception, cela se rencontre quelquefois ; mais qu'il puisse concevoir les relations des choses, peut-être serait-il sage d'en douter ! » Je crois que les sensations, les idées ont toujours précédé les mots. On peut éprouver les sensations de la chaleur et du froid, les distinguer, les comparer, avant de les nommer. Penser c'est parler, mais parler n'est pas toujours penser. Témoins le perroquet et l'écolier qui articulent les mots d'une eçou sans y attacher aucun sens. Et il v a tant de perroquets !