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588 LA REVUE LYONNAISE 1859) aussi profond savant que grand poète lyrique, Jean et Théodore Van Ryswick, Nolet de Brouwère, Blik, Reus, Van Kerekhoven, de Laet, toute la pléiade romantique, autant de noms populaires dans le pays flamand. A la même heure les Wappers, les H. Leys, les Gallait et tant d'autres grands peintres, prouvaient à leur manière, par des chefs-d'œuvre d'art, l'universelle vitalité de la renaissance. Chacun tournait les yeux vers cette glorieuse époque de trois siècles (xme-xvie) où la terre néerlandaise projetait sur l'Europe une si éclatante lumière, vers cette période communale qui était la prospé- rité même de la nation ; on cherchait dans l'héroïsme des ancêtres des exemples à proposer aux épiques d'alors ; on rétablissait le passé. Avec ses Chambres de rhétorique, Willems enfin allait présider les premières assises de la révolution flamande (1841) au Congrès linguistique de Gand, quand ce Livre parût qui s'appelait Y Année des Merveilles (1838). Conscience était dans la force de la jeunesse. L'influence de cette publication fut plus décisive peut être pour ses amis que pour lui-même, pour ses frères que pour ses amis, « Hij leerde zijn volk lezen. » Il apprit à lire à son peuple, voilà ce qu'on a inscrit sur le piédestal de la statue de bronze qu'Anvers lui élevait l'an passé, sur le perron de sa bibliothèque populaire. Il apprit à lire à son peuple ! Pour lui pas plus de bel éloge... Au moment où ce peuple n'avait d'autre lecture que la petite Bibliothèque bleue, pour le rassasier des aventures de Cabonus et Picavi, du Chevalier auCygne, de Geneviève de Bradant, Conscience parut, se lia avec les coryphées du jeune mouvement eï, comme en se jouant, fit une littérature à ce peuple. « Le plus grand obstacle à vaincre, a-t-il dit lui-même, dans le discours déjà cité, n'élait pas l'injuste prévention des hommes politiques et d'une partie des classes supé - rieures, mais surtout de l'indifférence delà masse du peuple fla- mand, lequel, sans contact depuis un siècle avec la civilisation et sans littérature, avait oublié qu'il existait des livres et ne lisait plus... plus rien! » Conscience eut bientôt compris l'idée de J. F. Willems, la régé- nerescence du peuple au moyen de sa langue propre. Sa conception géniale la transforma et c'est pour avoir fait luire cet agrandisse^