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                       SOUVENIRS D'ALGER                           475
ses enfants, ses parents, sans autres ressources que la charité
publique.
   Il faut une préparation préalable.
   Avant d'arriver aux lieux saints, on se met en « Ih ! ram », on
se coupe les ongles, on se coupe les cheveux, mais sans se les net-
toyer. Il est méritoire de garder la tête sale. On s'interdit rigou-
reusement les rapports sexuels, les bains, les parfums, le nettoyage
de toutes les parties du corps, excepté les mains, les vêtements
avec coutures, les ceintures, etc. Les poux, les ricinus qu'on peut
avoir sur soi ne doivent être ni tués, ni dérangés. Il est permis de
se débarrasser, mais sans leur faire de mal, des puces, punaises,
vers, mouches et fourmis.
   Sept tournées sont prescrites autour des lieux sacrés, pendant
les trois premières, on sautille suivant un rythme particulier, en
soulevant doucement les épaules. On embrasse une douzaine de
fois par jour la fameuse pierre noire apportée là par Abraham et
que Mahomet, dit-on, n'embrassait jamais sans pleurer. Enfin on
procède aux lapidations du diable, un diable qui a la vie dure, avec
sept cailloux à peu près gros comme des noisettes, ramassés dans
un périmètre déterminé, lancés certains jours, à certaines heures,
d'une certaine façon, a u n e certaine distance, en prononçant cer-
taines prières. Ces cailloux-là accumulés depuis des siècles forme-
raient des montagnes si les anges ne prenaient la peine de les enle-
ver, au fur et à mesure qu'on les lance.
   La moindre infraction à ces règles aussi multiples que burles-
que annule tout le mérite de l'entreprise.
   Il est difficile d'être plus bête. Les pèlerins de chez nous, eux au
moins, ne font de mal à personne, tandis que ceux de là-bas avec leur
crasse méritoire, leur vermine sacro-sainte, leur ignorance et leur in-
souciance de l'hygiène, leurs cadavres, et les cadavres de leurs bêtes
semés sur toutes les routes, empoisonnent l'atmosphère, entretien-
nent et promènent sous couleur de religion, un foyer de pestilence
qui est une menace permanente à l'adresse du monde entier. Je de-
mande le lazaret à perpétuité pour ces commis-voyageurs encholéra.
   Je dois ajouter que les pèlerinages, aujourd'hui surtout, se font
assez souvent par fondés de pouvoir, ce n'est pas bien orthodoxe,
mais si commode !