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526                  LA REVUE LYONNAISE
tous les partis : « Qui de vous a le droit de se dire victorieux ?
Avez-vous fondé l'ordre, la justice, la concorde, la paix? Où est
votre Dieu? Ubi est Deus tuus? » il n'a besoin, pour justifier son
optimisme inébranlable et la fierté de son espoir, que d'ajouter :
«Et moi, j'ai le mien! «Après avoir abaissé ses yeux sur le présent,
ce fils d'une Eglise abandonnée, ce patriote dévouéà un pays mal-
heureux, cet admirateur d'une civilisation en ruine, témoin de leurs
trois défaites, peut-être « aussi triste que s'il avait, à la fois perdu
sa mère, sa femme et son enfant, » relève ses regards vers
l'avenir, et a le droit de le fixer avec une immuable confiance, parce
qu'au milieu des épreuves de sa courte traversée, il a choisi un
pôle unique, la foi chrétienne, c'est-à-dire la croyance à un
 Créateur, à un Sauveur, à un Juge, la seule doctrine qui, dans
 tous les temps, dans tous les lieux, ait aidé à comprendre les deux
 plus grands phénomènes du monde : la vie et la mort.
     Il part de là, et de là il s'élève à une magnifique apologie du
 Christianisme, malheureusement demeurée sans doute encore à
 l'état fragmentaire, mais dont M. Henry Cochin a pieusement
 rattaché les fils et soudé habilement les parties éparses, en les divi-
 sant en quatre livres : Dieu, la Vie humaine, le Rédempteur, le
  Temps présent. Magnifique n'est pas trop dire. On abuse aujour-
 d'hui volontiers des épithètes, mais celle-ci reste au-dessous de ce
 que méritent aujourd'hui ces pages posthumes. Bossuet, Pascal,
 Leibnitz sont assurément plus profonds, plus graves, plus méta-
 physiciens, Chateaubriand est plus poète, et, au-dessous d'eux,
  Abbadie, parmi les protestants, puis M. Auguste Nicolas, dans les
  rangs catholiques, sont, tout en étant aussi limpides, plus pleins
  de doctrine, plus théologiens. Il ne faut pas l'oublier : Cochin
  écrivait pour lui seul, et ne se piquait pas, dans ses réflexions
  solitaires, de lutter de savoir ou de hardiesse avec les maîtres
  de l'apologétique chrétienne. C'est un homme du monde qui parle,
  et un homme du monde présent, pour qui la philosophie, les
  sciences, la théologie sont comme ces langues étrangères qu'on
  comprend bien, mais auxquelles on préfère sa langue maternelle.
  Il ne discute pas, il ne cherche point à enseigner, il exclut jusqu'à
  l'apparence d'un parti ou au soupçon d'appartenir à une école;
  il se borne à démontrer la vérité de la foi par l'expérience de la