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                       SOUVENIRS D'ALGER                            451
des perspectives vraiment harmonieuses, la quantité semble y
faire assez bon ménage avec la qualité, mais le moindre accident
provoque des écroulements lamentables, l'accident du mariage,
par exemple. Le vertical se change en horizontal, les collines en
vallées, les vallées en ravines, la glissade en trainage, le rose en
terre de sienne. La vierge charmait, la femme épouvante. Jamais
Diane, jamais Vesla n'ont plus impitoyablement puni les infrac •
tions de leurs nymphes et prêtresses aux lois de la chasteté. Fro-
mentin a consacré quelques lignes au sujet qui m'occupe, les voici,
textuelles :
   « Les Juives sont belles. Elles s'en vont, soit avec leur cruche
remplie, soit avec leur planche au pain, traînant leurs pieds nus
dans des sandales sans quartiers, leurs longs corps serrés dans
des fourreaux de soie de couleur sombre, et, portant toutes,
comme des veuves, un bandeau noir sur leurs cheveux nattés.
Elles marchent, le visage au vent, et ces femmes en robes col -
lantes, aux joues découvertes, aux beaux yeux fixes, accoutu-
mées aux hardiesses du regard, semblent toutes singulières dans
ce monde universellement voilé. Grandes et bien faites, elles ontle
port languissant, les traits réguliers, peut-être un peu fades, les
bras gros et rouges, assez propres d'ailleurs, mais avec des talons
sales; il faut bien que leurs admirateurs qui sont nombreux, par-
donnent quelque chose à cette infirmité des Juifs du bas peuple,
heureux encore quand leur malpropreté n'apparaît qu'au talon
comme l'humanité d'Achille ! »
   Est-ce lui qui a mal vu, est-ce moi? Ce qu'il y a de certain,
c'est que nous sommes, comme on dit en argot judiciaire, contraires
en fait, au moins, quant à la beauté; peut-être la génération ac-
tuelle ne ressemble-t-elle plus à l'ancienne ou quelque sentiment
de reconnaissance personnelle a-t il influencé le jugement de
Fromentin!                                                    . '
   Après "un long séjour de deux année?, deux types juifs, deux
 sans plus, ontfrappé mes yeux, sans me soulever le cœur, et enri-
 chi ma galerie de souvenirs. D'abord, dans l'encadrement d'une
 boutique obscureet basse, pleinede vieux cuivres, de vieilles armes,
 de vieilles faïences, d'étoffes, de broderies, de tapis, de colliers, dé
 serpents et d'oiseaux empaillés, de peaux de quadrupèdes sauvages