page suivante »
376 LA REVUE LYONNAISE peu. L'angoisse qu'ils souffrent marque, si elle ne le mesure, le bonheur qu'ils envient. Et ils se débattent, et ils se désolent, et ils s'évertuent, et ils s'ingénient, par amour de cette rive « plus outre», dont parle Virgile : ripee ulterioris amore. * On ne se plaint pas qu'il y ait trop de peintres, trop de musiciens, mais on trouve qu'il y a surabondance de poètes. Pourquoi? La peinture, la musique sont, comme métiers, supportables en- core; la poésie, à moins d'être une vocation, scandalise. Plus divine, on la veut plus discrète; moins rare, elle paraît moins pré- cieuse ; noble par-dessus tout, elle perd davantage à déroger. * En ce temps-ci les « Enfantines » pullulent. Hugo, Ségalas Ortolan, Beauchène, Jean Aicard, Ratisbonne... ont chanté les enfants à qui plu?, à qui mieux. Eugénie de Guérin aussi a désiré les chanter. Cette veine est nouvelle, cette veine est riche, je n'y contredis point, et ne me plains de rien, sinon de ce que les « En- fantines » sont pas mal souventdes enfantillages. L'amour est presque tout dans les romans, presque rien dans la vie. * Auguste Brizeux dans les Bretons, risque de se rompre les veines du cou à vouloir enfler la corne d'Armor. On croit ouïr quelque barde ancien traduit par Baour-Lormian. Il a transgressé le précepte d'Horace d'« éviter un fardeau inégal ». Homère appelle le soleil : « œil et oreille du monde ». Passe pour « l'œil », mais 1' « oreille », qu'est-ce que l'oreille a donc à faire ici? Ce mot étrange ne contiendrait-il pas en germe mainte dé- couverte toute récente sur la transmission du son par la lumière, de la lumière par le son ? foute langue a des termes à double emploi pour exprimer le