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NOUVELLE DAUPHINOISE. 225 pas voulu m'écouter ! Pourquoi faut-il que François n'ait pas été là , ce soir ! Je l'eusse envoyé, — lui, un homme ! chercher le médecin ; mais cette enfant, devenue si frêle depuis nos malheurs ! . . . Ah ! je tremble ! . . . Marthe continuait à être bien mal, et ni sa fille, ni le docteur n'arrivaient. A tout instant, Jeanne allait regarder sur le chemin ; elle ne voyait personne... Une inquiétude profonde, quelque chose comme un triste pressentiment envahissait alors son âme. — Marguerite ! Marguerite ! . . . Les heures s'écoulaient dans cette pénible attente. — Viens-tu, Marguerite ? Ah ! mon Dieu ! . . . Et l'état de la malade qui empirait ! La pauvre Marthe appelait aussi sa fille ; elle s'étonnait de ne pas la voir auprès d'elle. Enfin, Jeanne était encore à quelque pas de la porte, lorsqu'elle aperçut la voiture du médecin. Ah ! le voilà cette fois ! . . . Mais le docteur, un homme en cheveux blancs, qui avait vu naître Marguerite, qui l'avait caressée tout enfant, est grave, plus que d'habitude... de grosses larmes roulent sur ses j o u e s . . . il fait un signe à Jeanne, en lui disant d'une voix saccadée; — De la prudence !.. il est arrivé un grand malheur !... promettez-moi d'être aussi raisonnable que possible... n'allez pas crier I . . . vous pourriez tuer la,mère ! . . . - Alors, il soulève une couverture de voyage ; à la lueur de sa lanterne de route, il montre le visage pâle et endor- mi de Marguerite, étendue de tout son long dans la voiture... — Portons-la, sans rien dire, sur le lit de sa chambrette. Lorsqu'ils sont arrivés là , le bon docteur se met à fric- tionner l'enfant de toutes ses forces, lui fait avaler un cordial, en ouvrant ses dents serrées, la frotte encore vivement; puis, il secoue la tête, soulève ses épaules d'un air découragé, prend la main glacée de la jeune fille, qu'il baise avec respect, et dit tristement : 0 15 (